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En 1913,
Duchamp fait une véritable
découverte,
celle de la loi anthropologique qui conditionne nos jugements de goût. Elle est simple : pour qu'un objet créé par un artiste devienne un chef-d'oeuvre de l'art, il faut qu'il soit d'abord refusé par une majorité scandalisée de telle sorte qu'une minorité agissante trouve un bénéfice, en termes d'amour-propre, à réhabiliter l'objet et l'artiste.
Plutôt que de transmettre cette découverte par un discours auquel personne n'aurait prêté attention, il décide de prouver cette loi en la mettant à l'épreuve, mais de façon masquée, et c'est ainsi qu'en 1917 fait son apparition dans le champ de l'art une... pissotière.
Il restera alors à Duchamp un problème à résoudre : nous permettre, à nous, aujourd'hui, de comprendre la dimension anthropologique de son acte sous son apparence artistique, et ce sera la mission qu'il confiera à son uvre entier, conçu comme un gigantesque rébus, une machine célibataire où tout est en relation avec tout.
C'est la pertinence d'une pareille lecture, conduite hors cadre et en franc-tireur persuadé, qu'Alain Boton défend dans sa monumentale enquête à travers les « choses » de Duchamp, un « mode d'emploi » exhaustif et libre de ton qui vise à substituer à l'image commune de l'artiste intriguant et joueur celle d'un penseur dont la puissance et la profondeur excèdent les limites de l'esthétique.
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