Hermann Hesse poète ?
Nous connaissons surtout en France le romancier du Loup des steppes, de Siddhartha, du Jeu des perles de verre, l’esprit non conformiste, le pacifiste, l’exilé.
Pourtant dans l’œuvre immense de cette longue vie, la poésie est bien loin de n’occuper qu’une place secondaire.
Non seulement la Muse fut pour Hesse une compagne quasi quotidienne, non seulement les vers réunis par son éditeur, après sa mort, occupent deux forts volumes, mais il demeure, en dépit des esthètes qui le jugèrent souvent trop simple, trop naïf, l’un des plus lus, des plus populaires parmi les poètes allemands contemporains.
C’est en poète plus qu’en romancier que Hesse se considérait lui-même.
Une épitaphe de fantaisie figurant dans un carnet qu’il tenait vers sa trentième année l’indique clairement :
Ci-gît le poète lyrique H. Sans doute ne fut-il jamais reconnu comme tel, mais il fut grandement surestimé, en revanche, comme écrivain récréatif.
Assurément, Hesse n’a pas renouvelé l’instrument poétique, n’a pas créé d’école.
Bien au contraire, il s’est volontairement inscrit dans la lignée des romantiques allemands qu’il relisait sans cesse avec prédilection, en vers comme en prose, savourant chez eux l’admirable musicalité de la langue, la délicatesse des sentiments, l’amour sincère de la nature, l’ouverture sur le rêve, la participation enthousiaste aux royaumes de l’histoire et de la légende, et au-delà de ceux-ci, à l’inconscient collectif.
Pour présenter le poète Hesse au lecteur français, il a semblé raisonnable de se restreindre, de choisir parmi les quelque 700 poèmes publiés en 1962 en Allemagne, ceux qui sont à la fois représentatifs de la manière Hesse, les plus populaires dans les pays de langue allemande et les plus accessibles à notre public dans une version française.
C’est la matière d’un ou deux recueils que l’on trouvera ici (environ 80 poèmes), mais le choix s’étend sur toute une vie et suit à peu près, comme les éditions allemandes, l’ordre chronologique.