Koiliodaimôn
signifie donc
ventre-esprit
ou
ventre-dieu
c’est-à-dire
celui qui fait de son ventre
un esprit
Daimôn
a aussi le sens
de destin et plus précisément
de partage
L’idée d’un ventre-partage
Le banquet
une fois encore est dressé
mais à la condition qu’il éprouve
ici
l’idée collective
d’un partage
L’adresse du banquet suppose
que nous venions avec notre pain
et nos couverts
Il répond ainsi à cette formule
que Marcel Broodthaers
donnait en 1974
lors d’un entretien avec Irmeline Lebeer
à propos de la profusion des coquilles d’œufs
dans ces œuvres :
mais sur la table
où il y a trop
d’œufs
il y
manque
le couteau
la fourchette et l’assiette
Mais cette absence est fondamentale
en ce qu’elle permet de
faire parler l’œuf à table
ou ajoute-t-il
pour que le spectateur
ait une idée originale sur la poule
Ainsi si l’on vient avec son pain
et ses couverts
c’est pour que puisse se montrer
l’image
non pas de quelque chose
mais d’un usage laissé
en suspens
Ici l’usage est double, il est à la fois plastique en tant qu’il fait parler le réel et lui laisse la possibilité d’une teneur poiètique dans l’épreuve d’une adresse avec nous et avec notre étonnement devant ce qui advient et à la fois théorique en tant qu’il affirme, toujours, la nécessité de la puissance du spectateur pour qu’il y ait la possibilité d’un processus artistique.
Ce que l’idée de l’activité artistique indique est qu’il s’agit toujours d’une manière non pas close et passive d’éprouver un dispositif extérieur, mais au contraire de l’épreuve d’une coréalisation effective.
Le signe d’une crise sans précédent pour l’activité artistique se trouve dans sa transformation irréductible en objets et en valeurs symboliques caduques et silencieuses.
Ce silence est infini
parce qu’il replie l’être
sur une perte de la connaissance
La connaissance n’est pas
l’accumulation du savoir mais l’épreuve
de l’usage de celui-ci
C’est parce que nous confondons toujours l’accumulation et l’usage que nous perdons le sens de l’activité,
c’est-à-dire de l’agir
et donc de l’activité artistique.
C’est pour cela qu’il nous importe toujours de penser que la relation infiniment oubliée et occultée entre aliment et élément est fondamentale.
Elle indique ce que nous refusons de penser et qui est que dans l’usage il nous est impossible d’accumuler : c’est le silence de cette relation qui est inscrit dans la racine des termes aliment et élément.
Or si nous accumulons nous perdons la possibilité d’une épreuve de l’activité artistique et la teneur de notre vivant matériel.
C’est cela
qui est aussi indiqué dans le
koiliodaimôn.
Fabien Vallos,
juin 2016
Devenir Dimanche