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Jean Malrieux
Et maintenant j'ai rendez-vous avec le petit jour
Comme on n'aimerait pas en rencontrer au coin d'un bois.
Comme il fait froid
Dans un grand cœur qui s'ensommeille
Versez la vie.
Deux doigts,
Deux doigts de femme
De la tisane des grands vents.
Cinq heures, dit l'horloge. La mousse du café s'assemble au bord de
la tasse.
On dit que ce sont les baisers perdus.
La buée sur la vitre
Est une femme qui regarde.
Effacez la vitre.
C'est vite le geste de l'adieu.
L'air est une fourrure soluble.
Dans la glace est restée une épaule de jour.
Les ongles des ronces en sont à leur premier quartier.
Je salue, comme la fougère,
Du poing fermé de la forêt.
(Les maisons de feuillages)
Dans La Forêt en Fragments
Christaian Hubin évoque Jean malrieu :
(... ) En passant devant un pin qui perdait sa sève, j'ai évoqué son récit La fée sous l'écorce. Il s'est arrêté, a fixé l'arbre. Il suffit de voir. Écrire importe peu ; l'essentiel, c'est de s'émerveiller de ce qu'on voit, de ce qu'on vit. Comme je ne lui paraissais pas convaincu, il se colla les mains sur les tempes, à la manière dont un photographe délimite le champ de son regard. L'essentiel, c'est de cadrer. Le reste, les mots... Haussement d'épaules. La sensibilité et le regard sélectif suffisent-t-ils au poème ? Peu importe : j'avais devant moi quelqu'un pour qui de toute évidence la poésie n'était ni un prétexte à cuistrerie épistémologique, ni une façon de faire carrière, mais une manière de vivre - révolte comprise -, sans l'exigence de laquelle toute écriture touche au proxénétisme...
On n'en finirait pas d'épingler
dans toute l'oeuvre les professions de foi,
les exemples d'assentiments radieux :
L'âge d'or derrière une meurtrière / vise au coeur...;
Au coeur de l'être ne s'assouvira jamais le désir... ;
Tout est donné, terre et vie, avec démesure...
Christian Hubin José Corti pages 99/100
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