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Il n’y a plus rien
La pierre a de ces évanouissements
Voici
une forteresse
voici
un temple fruste
voici
un chaos de masures et de murs démantelés
tout
l’arrachement d’une ville déserte
Il n’existe ni ville
ni temple
ni forteresse
c’est la falaise
À mesure qu’on s’avance
ou
qu’on s’éloigne
ou
qu’on dérive
ou
qu’on tourne
la rive se défait
pas de kaléidoscope plus prompt
à l’écroulement
les aspects se désagrègent pour
se recomposer
la perspective fait des siennes
Ce bloc est un trépied
puis
c’est un lion
puis
c’est un ange et il ouvre les ailes
puis
c’est une figure assise qui lit dans un livre
Rien ne change de forme comme les nuages
si ce n’est les rochers.
Ces formes éveillent l’idée de grandeur
non de beauté
Loin de là
Elles sont parfois maladives et hideuses
La roche à des nodosités
des tumeurs
des kystes
des ecchymoses
des loupes
des verrues
Les monts sont les gibbosités de la terre
Madame de Staël entendant M. de Chateaubriand
qui avait les épaules un peu hautes
mal parler des Alpes
disait :
Jalousie de bossu
Les grandes lignes et les grandes majestés de la nature
le niveau des mers
la silhouette des montagnes
le sombre des forêts
le bleu du ciel
se compliquent d’on ne sait quelle dislocation énorme
mêlée à l’harmonie
La beauté a ses lignes
la difformité a les siennes
Il y a le sourire et il y a le rictus
La désagrégation fait sur la roche les mêmes effets
que sur la nuée
Ceci flotte et se décompose
ceci est stable et incohérent
Un reste d’angoisse du chaos est dans la création
Les splendeurs ont des balafres
Une laideur
éblouissante parfois
se mêle aux choses les plus magnifiques
et semble protester
L.A.Photographies
le Verdon octobre 2017
avec Victor H.
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