nous
autres civilisations
nous savons
maintenant que nous sommes mortelles
nous avions
entendu parler de mondes disparus
tout entiers
d’empires coulés à pic avec
tous leurs hommes et
tous leurs engins
descendus au fond inexplorable des siècles avec
leurs dieux et
leurs lois
leurs académies et
leurs sciences pures et appliquées avec
leurs grammaires
leurs morphologies
leurs dictionnaires
leurs trésors
leurs codex
leurs lexiques
leurs classiques
leurs romantiques et
leurs symbolistes
leurs peintres
leurs critiques et les critiques de
leurs critiques
nous savions bien que toute
la terre apparente est faite de cendres que
la cendre signifie quelque chose
poudre
résultant de
la combustion
complète de certaines
matières
une passion qui survit
un feu qui couve sous la cendre
une énergie qui attend son heure
nous apercevions à travers l’épaisseur
de l’histoire
les fantômes
d’immenses navires qui furent chargés
de richesse et d’esprit
nous ne pouvions pas les compter
mais ces naufrages
après tout
n’étaient pas notre affaire