FABLE
Par le mot par commence ce texte
Dont la première ligne dit la vérité,
Mais ce tain sous l'une et l'autre
Peut-il être toléré ?
Cher lecteur déjà tu vois
Là de nos difficultés...
( A P R E S 7 ans de malheurs,
Elle brisa son miroir.)
***
c'est
un poème de six lignes
plus une
le titre
ce qui fait sept
plus deux lignes entre parenthèses
qui supplémentent d'
une autre façon le poème
par l'ajout de ces deux lignes
le chiffre sept est encore privilégié
car aux sept premières lignes
le texte compare
les sept ans de malheur après lesquels
le miroir est brisé
le mot par lequel le poème commence par est répété dans la même ligne ce qui forme un syntagme de quatre mots par le mot par qui engage un rythme initie un contour mélodique
du donc de la première ligne à l'APRÈS de la parenthèse on est dans un récit une histoire ordonnée qui se raconte et se décrit elle-même
la fable inaugure
un discours et un dispositif textuel
elle se donne à lire comme légende sans qu'on puisse distinguer sa face récitée de sa face récitante
en parlant de la parole elle effectue son propre engendrement auto-affection comme les premiers mots de l'évangile de Jean
Au commencement fut le logos
avant la phrase qui raconte cet événement
la fable n'existait pas
en se donnant à lire
elle ne raconte pas ce qui a eu lieu avant elle
elle se déploie dans le même
se réfléchit sur elle-même
institue
une réflexivité originaire
mais n'en reste pas là
si elle ne tolère pas le tain du miroir
c'est pour obéir à loi du langage
un acte inaugural
qui est aussi
une archive
dès la première ligne
deux fonctions hétérogènes sont confondues
performatif et constatif
invention de langage et disposition
le titre est fable
c'est le nom d'
un genre
et c'est aussi son thème
la fable se présente comme
une allégorie
le mouvement d'
une parole
qui passe de l'autre côté du miroir
nous parlons
notre parole reste en nous
mais il s'agit de l'autre en nous
il ne s'agit que de ça
Evénement
dès que je parle
je dois faire le deuil de la parole en moi
je dois accepter cette blessure
je pleure
je souffre
je me meurs
en voici que s'annonce le désir de l'autre
***
la structure de l'allégorie est séquentielle
et narrative
elle permet au langage de parler de lui-même
tout en disant l'autre.
quand on raconte
une histoire
elle avance au-delà d'elle-même
ce qu'elle donne à lire n'est pas nécessairement
temporel.
***
ce texte simple
parfaitement intelligible et normal dans sa grammaire
déconstruit des oppositions
comme
dire/faire
constatif/performatif
langage/métalangage
il réunit deux fonctions hétérogènes
1
son malheur
c'est qu'il ne parle que de lui-même
il se répète
il se fait l'écho de son propre discours
dans le jeu spéculaire infini du miroir et du langage
auto-référence
2
le miroir instable finit par se briser
à moins que dès le début il n'ait été brisé
le texte démontre en acte qu'il peut y avoir de l'invention,
du nouveau
hétéro-référence
s'instituant
comme événement
comme oeuvre,
il perturbe les normes de l'écriture classique.
***
2 x 7 = 14 = 5
Par
le
mot
par
commence
ce
texte
Dont la première ligne dit la vérité
FABLE