je suis bête
bête
est flemmard
et jamais bien préparé
il se sert de ses intuitions et de ce qui lui passe
par l’esprit
délibérément amnésique l’Histoire c’est quoi
bête est
une tabula rasa
tout vide
peu soucieux
du progrès et de récits explicatifs
bête
se déplace latéralement
revenant parfois en boucle sur lui-même
bête aime la facilité
évitant les moments extrêmes et les crescendos
bête aime la stase
les grilles
et les systèmes prévisibles
simplement parce qu’ils demandent
moins d’efforts
de la même manière,
bête aime le
re
la recontextualisation
le recadrage
le refabriqué
le remixage
le recyclage
plutôt
que la création laborieuse à partir
de rien
bête aime le désordre
de la contradiction et fait ses délices
de la beauté
du ridiculement évident
faisant commerce
du quotidien et du commun
bête joue
un jeu à petites mises
puisque bête n’a rien à perdre
bête ne doit rien à personne et c’est
comme ça qu’il est
libre
***
dans le Théétète Platon utilise la métaphore de la tabula rasa pour la première fois
s'interrogeant sur la nature de la connaissance et sur les causes des jugements faux Socrate émet l'hypothèse qu'il y a dans nos âmes des
tablettes de cire plus grandes en celui-ci plus petites en celui-là, d'une cire plus pure dans l'un dans l'autre moins trop dure ou trop molle en quelques-uns en d'autres tenant un juste milieu
Platon se réfère ici aux tablettes que les Grecs comme les Romains utilisaient comme support de l'écriture la tabula qu'ils grattaient avec l'extrémité plate du poinçon pour y effacer ce qui y avait été écrit auparavant et l'araser ce qui la rendait réutilisable
chez Platon la tablette contenue dans l'âme joue le rôle de mémoire : elle conserve toutes les empreintes de ses sensations et de ses réflexions reçues par l'homme afin qu'il ne les oublie pas
ainsi la capacité d'apprendre et de porter des jugements corrects sur les choses dépend de la qualité de la cire dont est constituée la tablette : quand celle-là est profonde, en grande quantité, bien unie et bien préparée les objets qui entrent par les sens et se gravent dans ce cœur de l'âme y laissent des traces distinctes d'une profondeur suffisante et qui se conservent longtemps et alors on a l'avantage en premier lieu d'apprendre aisément, ensuite de retenir ce qu'on a appris enfin de ne pas confondre les signes des sensations et de porter des jugements vrais