Si tu prêtes l’oreille les pierres parleront
non en mots
mais en densité
en grain
en tremblement immobile
Leur langage est fait de strates
de pressions anciennes
d’un temps qui ne s’écoule pas
comme le nôtre
mais se dépose
couche après couche
dans leur silence minéral
Elles racontent la lente fabrication du monde
les forces qui ont plié la terre
le passage ancien des eaux
les brûlures du soleil
les fractures de la nuit
Pour entendre les pierres il faut ralentir
jusqu’à leur vitesse
s’asseoir
laisser tomber l’empressement
accorder son souffle
à leur immobilité
Alors quelque chose se dévoile non une révélation
mais une infime correspondance
comme si le corps reconnaissait
une mémoire plus vieille que lui
Les pierres ne parlent pas pour informer
mais pour rappeler
le monde tient debout
par des forces patientes
et toute existence
même brève
porte en elle
la continuité de ce silence

