BATALLA
paysages maintenant
en premier lieu
il y a
cette ligne qui existe à peine
l’horizon est une idée
là entre le ciel et la terre
entre le ciel et le sol
entre le ciel et la découpe du sol
la forme du sol mêlée à la forme du ciel
cette relation
cette rencontre
cet empilement presque
il y a ce tracé
comme un fil jeté
une fonction spéciale sans formule
le rappel des forces qui organisent le paysage
une ligne pour la pensée qui compose le paysage
je compose avec la pluie le vent
avec la force d’élévation des arbres
la capacité qu’a une pierre de soutenir une autre pierre
la lumière rasante et l’écrasant de la lumière haute
avec la cohésion des sols
je vois
cette campagne
cet océan
cette ville
cette usine
ce pont
cette route
cette montagne
ce fleuve
ces nuages
ces arbres
ce port
ce champ
cette station
d’épuration au fond du vallon
tandis que
les vaches paissent
ces rochers
la ligne de chemin de fer
l’ensemble devant moi étendu comme
un monde
comme
une figure du temps
la scène sans cadre des apparitions
j’observe maintenant
mon regard posé depuis le promontoire ou depuis
une pierre
une chaise immobile
ou depuis
le bord de la route
une méditation
une pause
une étude
d’abord les couleurs et les formes
l’élémentaire le continu l’interrompu
les éléments l’eau les nuages le rapport au ciel les plantes
viennent ensuite
les figures les ruptures de l’horizon les verticalités
le dessin des strates de la falaise
les traces des lits des villes
le lent mouvement des lignes
puis c’est le tour des évocations comme
des erreurs de perception
comme des variations
la masse brumeuse
qui au petit matin monte entre les chaînes de montagnes
lointaines peut bien être
un fleuve d’azote
ce tronçon argenté de rivière peut bien être
un étang
au loin le front de l’industrie chimique hérissé face à
un champ de maïs
la ville comme
une croûte de sel orange
le sommet semble avoir disparu sous
un nuage rond
paysages maintenant
Michaël Batalla
Éditions Jean-Michel Place
Collection Passage Vérité
2007
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire