le poème jaillit de l’eau et y retourne
il est
chaque fois
une nouvelle tentative
d’écriture liquide
elle luit
elle bande l’arc de son lit
un sentier
de senteurs et de sentiments
pour rappeler
la beauté du trajet veiné et des rives
de ma contrée
traversée
en canoë
vous pouvez dire
la vérité
de la rivière ma main au feu
le verbe luire mène au lit
et
le lit
nécessairement
à la rêverie et à la dérive
aux rives et à la vérité
comme le sentier
aux senteurs et aux sentiments
un poème
fait d’
une seule matière sonore
aussi fuyante que continue
à l’image de l’eau
on a l’impression qu’elle est fugitive
mais en fait elle est toujours là
et si
l’écoulement est infini
le voyage l’est aussi
la figure de Noé
est convoquée plusieurs fois notamment par
la mention de ses colombes
j’ai dans mon canoë les colombes de Noé
et parce que le mot canoë
fait entendre
le prénom
cependant
aucune terre n’est véritablement attendue
Autour du canoë
?
le déluge
météorologique
la montagne sous l’orage
ou proprement humain
dire que depuis des siècles ils n’ont pas avancé
ils tuent
ils noient
ils affament les nations
mais le canoë
comme le poème n’est pas
un abri
il traverse le déluge et permet de continuer
d’avancer
de filer
de fuser
l'essentiel est l’énergie de l’eau
des mots
le mouvement
on s’est mouillé on est sauvé
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