Notre
héritage n'est précédé d'aucun
testament
Hannah Arendt
cite
un aphorisme de René Char
publié dans Feuillets d'Hypnos en 1946.
Pendant la Résistance, une génération d'écrivains et d'hommes de lettres européens a mis en place, dans le vide politique créé par l'effondrement de l'ancien système, un domaine public distinct, un espace nu où la liberté pouvait apparaître.
Mais cette possibilité n'a pas duré
longtemps.
Rapidement,
ce trésor apparu à l'improviste
dans des conditions mystérieuses,
a été perdu.
Cette génération
n'a pas été capable de lui donner
un nom.
L'histoire des révolutions
1776 à Philadelphie, 1789 à Paris, 1956 à Budapest
s'est répétée.
Sans testament,
aucun passé n'est assigné à l'avenir.
Il n'y a pas de tradition qui choisit,
nomme,
transmet et conserve.
Sans continuité dans le temps,
on ne connaît pas la valeur des trésors.
Les héritiers, les acteurs et les témoins, incapables de donner un nom à ce dont ils ont hérité, finissent par l'oublier.
C'est alors que la tragédie commence.
En l'absence d'une conscience capable de questionner, méditer, se souvenir, raconter l'histoire et lui donner un sens, l'action n'a de valeur que pour les morts et n'en a aucune pour les vivants.
L'acte ne s'achève pas,
l'événement échappe.
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