Seamus Heaney
1939-2013
Omniprésente, imperturbable
Est la vie dont surgit la mort.
Il ne faut pas de plainte, il ne faut nulle plainte
Puisque les seigles ondulent près des ruines
Menthe
Bouquet de petites orties poussiéreuses,
Herbes folles au flanc de la maison,
Elle poussait derrière les déchets et les bouteilles vides,
Jamais verdoyante, presque invisible.
Disons-le : elle était aussi une promesse,
Une fraîcheur dans l’arrière-cour de notre vie,
Quelque chose d’inachevé mais de tenace
Qui flânait parmi les allées vertes.
Petits coups de ciseaux, lumière du dimanche
Matin où l’on coupait la menthe avec amour :
Restera cela même qui m’échappe aujourd’hui.
Donnez leur liberté aux choses qui survivent.
Que les odeurs de menthe se fassent capiteuses, démunies,
Prisonnières qu’on libère en cette cour,
Victimes de notre indifférence que nous condamnons
Pour les avoir trahies par notre indifférence.
Seamus Heaney
L’étrange et le connu
traduit de l’anglais Irlande
par Patrick Hersant
Gallimard
2005
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