20 notes préparatoires brèves
entre poème et essai
sur la géologie d’une chaîne de montagnes imaginaire
dans un ton poétique à légère dérive
fantastique
La chaîne est née d’un malentendu entre deux plaques l’une voulait fuir l’autre se souvenir
Les roches les plus anciennes gardent la chaleur d’un soleil antérieur à toute chronologie
Certaines strates ne correspondent à aucun âge connu elles semblent déposées par anticipation
Le schiste y se fend comme une pensée trop longtemps contenue
On trouve des fossiles d’animaux qui n’ont jamais existémais dont l’absence est attestée
Les sommets ne culminent pas ils hésitent oscillant légèrement dans l’air froid
Une veine de quartz traverse la chaîne comme une phrase inachevée brillante et muette
La montagne centrale est creuse elle résonne lorsque le vent y entre, comme un instrument lent
Les éboulis récents contiennent des pierres déjà usées comme si elles avaient chuté plusieurs fois
À l’aube la géologie semble mobile les lignes de faille se déplacent à peine mais assez pour être senties
Certains minéraux ne réfléchissent pas la lumière ils la retiennent puis la rendent la nuit
Les glaciers fossiles sont faits de sel et de silence compacté
On a mesuré une lente montée verticale du massif corrélée à l’intensité du regard humain
Les cartes géologiques vieillissent plus vite que le terrain qu’elles décrivent
Des roches volcaniques froides portent des inscriptions naturelles lisibles seulement en marchant
Les sources thermales émergent là où la montagne rêve le plus intensément
Une couche de basalte noir absorbe les pensées trop lourdes les marcheurs y repartent plus légers
Les failles ne séparent pas elles relient des temps incompatibles
À grande profondeur la montagne n’est plus solide mais attentive
L’érosion finale ne détruira pas la chaîne elle la rendra enfin lisible

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