écriture élamite linéaire

traits droits gravés dans l’argile
chaque signe retient un souffle ancien
le mot se tient avant d’exister
la pierre et la main se répondent
un langage suspendu entre le geste et le temps
mémoire fragile des nombres et des noms oubliés

l’écriture élamite linéaire
système ancien utilisé en Élam région de l’actuel sud-ouest de l’Iran
les signes sont tracés en lignes droites et angles simples sans cursive
principalement employée pour les inscriptions administratives et économiques
les textes sont souvent brefs gravés sur argile ou pierre

elle témoigne d’une des premières tentatives de 

notation écrite structurée en Mésopotamie orientale 

sa lecture reste partiellement déchiffrée

limitant la compréhension complète des textes

topologie

étude 

des propriétés 

des formes et 

des espaces qui restent inchangées sous 

déformations étirements ou pliages

un ensemble ordonné peut être 

muni de plusieurs topologies issues de l'ordre  

la topologie de l'ordre 

la topologie de l'ordre à droite  

la topologie de l'ordre à gauche

une relation d’ordre
chaque élément connaît sa place
aucun ne s’avance sans règle
le plus grand se tient au-dessus du plus petit
le plus petit se tient sous le plus grand
tout s’aligne dans une hiérarchie invisible
comme le souffle qui organise le silence
ou la lumière qui classe l’ombre

 

LA PIERRE MENTALE

questi  la terra in se stringe et aduna 

la terre se resserre et se rassemble en elle-même 

pour soi le sol bref
il se tient sous le pas discret
petite étendue qui suffit au souffle
chaque grain connaît sa place
la terre se fait mesure et demeure
un instant limité mais entier

terra  la terre

in se  en elle-même à l’intérieur

stringe  se resserre se contracte

aduna ou adunat  se réunit se rassemble

une concentration de la terre sur elle-même 

un mouvement intérieur d’unité ou de densification

la terre se resserre et se rassemble en elle-même
comme un souffle qui replie ses vagues sur leur origine
la matière se concentre sans bruit

chaque pierre 

chaque racine retrouve sa place

le monde 

semble tenir 

dans 

un seul battement 

invisible

il y a 

aussi des 

passages par l'aride

où le monde s'y déploie sec et nu

aucune exubérance 

seulement la patience des pierres

 

ROSELEND

par éclats détachés de l'insaisi

terre

in se stringe ed aduna

se resserre et se réunit en lui-même 

une concentration ou une unité intérieure

un repli vers soi-même qui devient cohérent ou compact

comme 

un souffle qui retourne à sa source

tout mouvement 

s’apaise dans la lumière intérieure

chaque fragment retrouve 

sa place

et

le centre invisible 

devient visible dans le calme

les Enclaves octobre 2025

les mots de la langue que je ne connais pas brûlent 

un peu au-dessous des yeux

hypertexte

texte ouvert comme un réseau de souffles
chaque mot appelle un autre mot ailleurs
aucun chemin n’est unique
la lecture devient déplacement
le sens se tisse dans la dérive des liens
un texte qui ne se termine jamais
car il s’écrit dans la traversée

noirceur de l’éclair

la lumière si vive qu’elle brûle sa propre clarté

le jour se renverse dans son éclat
le ciel ouvre un passage vers son ombre

un instant tout devient visible et absent

la nuit 

reprend ce qu’elle a donné 

par le sol

volvent 

dans ses 

volutes 

de montagne

se déploient et tournent en tournoyant comme 

un souffle ou une fumée en mouvement

formes enroulées qui s élèvent 

ou se déploient en spirale dans l'air ou la matière

synchronicité différée dans le temps

deux gestes qui se répondent sans se croiser

leurs échos voyagent à travers la durée

le présent reçoit l’onde d’un passé qui l’attendait

chaque instant se décale pour rejoindre l’autre

la 

coïncidence 

arrive en retard

la précision d’un accord secret dans l'inquiétude du mouvement

ce moment où tout s’ajuste sans calcul
les formes se reconnaissent sans se nommer
un silence exact relie les choses
comme si le monde respirait à l’unisson
dans la clarté brève d’une évidence partagée

tenir

les échéances 

en haleine 

tout changer sans déborder

bouger les formes sans briser les contours

laisser le monde se transformer à l’intérieur de lui-même
que rien ne s’efface mais que tout se déplace

le mouvement 

discret 

d’une mue silencieuse

l'inflexion éternelle des moments

inflexion

le point où la ligne change d’allure

ni montée ni descente encore

un souffle imperceptible dans la courbe

le mouvement hésite puis se décide

la forme se redresse sans rompre

comme une pensée au seuil de sa mutation

l’équilibre entre le geste et sa limite

cet instant où l’élan s’arrête avant la rupture

la tension juste où naît la forme

ni excès ni retrait seulement la mesure

le corps sait avant la pensée

jusqu’où le mouvement peut aller sans se perdre

dans ce seuil fragile réside la beauté

est-ce un lac cette disponibilité de l’œil
surface offerte au passage des formes
où la lumière vient se poser sans effort
rien ne s’y retient tout s’y reflète
le regard devient eau immobile
prêt à accueillir ce qui vient
sans nommer ni juger
juste voir jusqu’à la transparence

 

le nombre un

origine et frontière tout à la fois
il contient la promesse de tous les autres
sans lui rien ne se compte rien ne commence
un seul battement avant la multitude
il est le centre sans cercle

la présence pure avant le partage

silence qui ne se laisse pas nommer
immobile et totale dans l’instant
aucun poids ni éclat ne la traverse
elle suffit à elle-même
comme l’air avant le souffle
ou la lumière avant le regard

dimanche

fonction monotone

courbe qui ne revient jamais en arrière

elle monte ou elle descend mais ne trahit pas sa direction
chaque point sait ce qui le précède et ce qui le suit

un mouvement fidèle à sa loi intérieure
comme un souffle régulier dans le corps du nombre

une patience mathématique tournée vers l infini

mesure du temps sans émotion

le nombre attend que la main le trace

la ligne se tend vers l infini sans hâte

chaque point respire à sa juste place

le calcul devient une forme de silence

où la pensée compte pour ne pas disparaître

les calculs 

de côté l'inévitable 

descente 

du ciel

 

monogène

issu d’une seule origine
né d’une source unique qui se répète en silence
le multiple y dort dans l’unité première
chaque forme rappelle le même battement
un monde entier contenu dans une naissance
l’écho d’un commencement qui ne se divise pas

nul n'a jamais vu Dieu

le fils monogène

qui demeure au sein du Père

lui nous le fait connaître 

J/1/18

passé simple un oiseau traça le premier mot du jour

après le déluge

les castors bâtirent

la terre respira sous le poids du ciel lavé
les eaux se retirèrent en laissant des reflets d' argent
le silence s étendit plus vaste que la peur
les choses renaquirent sans nom ni mémoire
chaque pas sur la boue inventa un commencement

après le déluge

les enfants en deuil regardèrent les merveilleuses images 

les 

montagnes 

émergèrent 

comme 

des épaules 

d'argile

le vent essuya la bouche des rivières 

un monde ouvert

sans bord ni centre
où le regard ne rencontre que des passages
les formes se déplacent les limites se défont
rien n’est clos tout respire et circule
le sens s’invente à mesure qu’on avance
comme si chaque pas agrandissait le réel

monde

sphère de souffle et de matière

pluie d’instants reliés par le regard

tout y commence en silence

la pierre le vent la peau le mot

chaque chose appelle une autre

l’ensemble tient par un fil invisible

respiration partagée du visible et de l’invisible

ouvert

comme une porte sans mur

un espace qui invite sans enfermer

la lumière y entre sans effort

le temps y circule sans mesure

tout ce qui vient y trouve sa place

et ce qui part y laisse encore sa trace

l'enfant tourna ses bras compris 

des girouettes et 

des coqs 

des clochers 

de partout

horizon d'attente

le regard avance avant le mot avant le geste
attente tissée de souvenirs et de désirs
l œuvre se déploie et trouble la ligne invisible
le lecteur flotte entre ce qu il sait et ce qui arrive

un souffle 

suspendu 

entre 

possible et surprenant

mimésis
le monde se reflète dans le geste et la forme
le corps et la lumière deviennent langage
l 'art devient miroir sans se confondre
chaque mouvement chaque regard chaque ombre
rendent visible ce qui toujours échappe

un écho 

du réel 

suspendu 

dans le silence

 

métatexte

texte qui se regarde écrire
chaque mot observe le suivant
les phrases se devinent avant de naître
le langage se plie à lui-même
le texte devient miroir et souffle
il dit son propre geste sans se cacher
présence consciente de soi dans le vide des lignes

ce poème commence sans savoir ce qu’il dira

chaque mot hésite avant de se poser sur la page

je l’écris pour vous mais je l’écris surtout pour lui-même

il se tient là entre mes mains et vos yeux

conscient de chaque silence et de chaque espace

le texte parle de lui-même 

de sa création et de sa présence sur la page 

c’est exactement ce qui fait de lui 

un métatexte