une
marche
est
une
alliance
le retour éternel
d'un double
pas
un
simulacre de cercle
sans cercle
Quand on marche
pour pouvoir marcher
il ne faut pas que les deux pas se rejoignent
Chaque pas habite l'autre
le marque
puis chaque pas efface l'autre
sans le toucher
Sans négation ni dénégation
chaque pas rature
l'autre
Il n'y a
ni contact
ni contiguïté entre eux
il n'y a
pas de relève pas
de reste
Les pas ne reviennent
jamais au
même
Mais
dans la langue
on ne peut pas séparer
ce pas du ne ... pas
de négation
Pour marcher
faire un pas de plus
un autre pas
il faut franchir une limite
l'emporter
Ce franchissement
ne transgresse
rien
c'est un bord
sans
bord
Il y a toujours deux pas
alliés l'un à l'autre par une alliance
sans contrat
sans pacte
sans origine
sans but qui le précède
sans objet
sans sujet
une alliance
de l'un au tout autre
dans une différence infinie
L'un affecte
l'autre
en le franchissant
Il le garde et il
le perd
Le simulacre de cercle
c'est qu'on revient toujours à l'autre pas
et aussi au double pas
Dans ce retour éternel
chaque pas répond déjà à l'autre
chaque pas oublie l'autre
Il n'y a
déjà plus de
cercle
Il y aura
toujours à nouveau
deux pas
mais ce ne seront pas
les mêmes.
Qu'est-ce qu'un pas?
A la fois un mot
qui ne distingue pas le singulier
du pluriel
et
ni un mot
ni une chose
mais
un mouvement
en-deça du langage
et aussi
au-delà de tout et de lui-même
Parages
Jacques Derrida
55
*
Penser
c'est penser autrement
On ne pense qu'autrement
La pensée
se voit contrainte
de penser ce que pourtant
elle ne peut pas penser encore
Penser est
dans un rapport fondamental
avec l'affect
l’œil est brillant
barbe blanchie de neige
il part comme quelqu'un d'étonné
ayant d'un coup
perdu le
sens
moi
je ne prononce pas
un mot
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