il était une fois sur cent
Rêveries fragmentaires sur l’emprise statistique
Yves PAGÈS
Des années durant
l’écrivain Yves Pagès a glané toutes sortes de statistiques
notant dans un carnet
des centaines de pourcentages
De ce vertigineux inventaire il a fait un livre étrange qui entre jeu littéraire à la Raymond Queneau et réflexions philosophiques à la Theodor Adorno reconstitue par fragments le tableau d’une société infestée par une vision comptable du monde
Difficile de rompre la glace du monstre statistique d’échapper à ses ordres de grandeur qui prétendent tout recenser de nos faits et gestes quantifier nos opinions mettre en coupe réglée nos vies matérielles.
Sous emprise comptable chacun se sent casé d’office sondé de bas en haut pris au piège
Mais alors comment nous soustraire au grand dénombrement ?
Sans prétention d’exhaustivité l’auteur se propose de passer ces données brutes au tamis de rêveries interprétatives pour traquer leurs failles implicites ou les confronter à d’autres cas de figure
À la logique de la quantification de toutes choses il oppose par collage accumulation et divagation une poétique de l’absurde
Par-delà cet art du détournement stylistique il nous livre en pointillé une analyse caustique de la condition des vivants à l’ère de la gouvernance par les nombres agrémentée de quelques suggestions paradoxales pour passer entre les mailles du filet statistique
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DÉPEUPLEMENT INTERPERSONNEL – Près de 14 % des Français sous le seuil de pauvreté (1 063 euros mensuels en 2019) avouent n’avoir « pas d’amis ». Plus précisément, 5 millions de personnes de 15 à 70 ans souffrant de grande solitude – faute de liens familiaux vivaces, d’un reliquat d’amitiés durables ou de contacts directs avec des collègues de travail – déplorent n’avoir eu qu’une ou deux ou maximum trois conversations personnelles au cours de l’année écoulée. En revanche, 65 % de ces asociaux malgré eux pensent qu’on n’est jamais assez méfiant vis-à-vis des autres, ces rares alter ego du voisinage qui, souffrant sans doute du même syndrome insulaire, se protègent comme ils peuvent en leur rendant la pareille.
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