jeudi, décembre 18, 2025


La singularité et l’événement 


la singularité 

est ce point unique irréductible qui ne se répète jamais

elle est essence d’un instant

densité d’être concentrée dans un lieu ou un geste particulier 

la singularité se distingue par sa présence intense

comme un éclat qui ne se confond avec rien d’autre


l’événement


















est la manifestation de ce qui advient 

mouvement rupture rencontre

il se déploie dans le temps touche plusieurs éléments

modifie l’ordre établi


là où la singularité est centre

l’événement est prolongement


là où la singularité frappe

l’événement résonne


entre singularité et événement se crée une tension fertile 

le premier fixe un point d’intensité

le second l’inscrit dans la durée et le réseau des possibles


la singularité 

sans événement reste isolée 

l’événement sans singularité se dilue

ensemble

ils fondent le tissu même 

de l’histoire et de l’expérience 

un lieu où l’instant unique 

devient événement porteur de sens























.

 

La Deuxième Vie n’est pas ailleurs

elle n’attend ni la mort ni un autre monde
elle est déjà là
en filigrane dans la première

comme une ligne d’horizon 
que l’on regarde sans la voir


















Tout dans la vie ordinaire en porte les signes 

les instants de suspension

les ruptures de sens

les élans soudains 

où le monde cesse d’être seulement utile





Mais la plupart passent devant ces seuils

comme devant une porte sans poignée

l’initiation n’ajoute rien




Elle n’ouvre pas un royaume caché

elle apprend à voir autrement ce qui est déjà donné

elle déplace l’attention

désaxe le regard

retire au réel son évidence anesthésiante



Alors la première vie ne disparaît pas

mais elle devient transparente

le même geste le même jour le même lieu 

et pourtant autre chose s’y révèle 

une profondeur une intensité une responsabilité nouvelle d’être là



La Deuxième Vie n’est pas un refuge

mais une exigence

elle demande de vivre sans écran

sans se réfugier dans l’automatisme

sans se croire quitte avec l’existence




C’est pourquoi peu en ont conscience

non par manque de capacité

mais parce que cette lucidité oblige

voir la Deuxième Vie dans la première

c’est ne plus pouvoir vivre tout à fait comme avant

























la novlangue libérale
termes qui adoucissent masquent ou inversent 
des réalités sociales et économiques 



Plan de sauvegarde de l’emploi 

licenciements

Optimisation des ressources humaines 

suppressions de postes

Flexibilité du travail 

précarité

















Réformes structurelles 

réduction des droits sociaux

Modernisation 

dérégulation / privatisation

Compétitivité

baisse des salaires ou protections

Dialogue social 

décisions déjà actées

Mobilité professionnelle 

obligation de changer de poste ou de lieu

Responsabilisation des individus 

désengagement de l’État

Coût du travail 

salaire et protections des travailleurs

Adaptation au marché 

soumission aux logiques financières





cette novlangue 
transforme le langage en outil de neutralisation critique
en donnant une apparence positive ou technique 
à des mesures souvent violentes
socialement
























 





Elger Esser Voyage en Egypte 2011


Impensable réalité







ce qui existe sans nom ni forme

présence qui échappe à la raison

bord du connu où la pensée vacille



elle impose sa densité silencieuse et défie toute capture conceptuelle






Physique et sagesse traditionnelle

connaissance du monde par la mesure et le souffle


l’une observe
calcule
décompose

l’autre écoute
ressent
harmonise

entre lois et rituels
le réel se révèle double  tangible et vivant




















obstacles qui passent comme nuages














tension du présent
friction entre désir et réalité
ils ne durent pas
mais laissent leur marque
guide discret de l’expérience et du courage
















le copier-coller 
n’est
ni un appauvrissement de l’écriture 
ni un plagiat facilité 
c’est un geste neuf
un geste de capture
qui transforme 
notre manière de produire 
et de faire circuler les textes
en retraçant son histoire
l’auteur révèle 
non seulement une évolution technique
mais aussi des changements culturels 
et mentaux qui accompagnent 
nos vies en ligne











le plagiat 
est une copie 
qui a comme objectif 
de s’invisibiliser
tout plagiat est une copie
mais toute copie n’est pas un plagiat
le plagiat est 
une notion à caractère axiologique
là où la copie est 
une pratique d’écriture 
parmi d’autres

































La tension conceptuelle 



naît entre deux pôles qui ne se résolvent pas l’un dans l’autre 

elle n’est ni contradiction stérile 

ni synthèse immédiate mais maintien d’un écart actif

chaque terme éclaire et limite l’autre

cette tension est productive 

elle empêche la pensée de se figer

l’oblige à circuler à rester en éveil

penser ici ce n’est pas trancher mais tenir ensemble 

accepter l’instabilité comme condition de la clarté

















là où la réponse ferme la tension ouvre

elle est le lieu même où le sens travaille











La carte et le territoire 


la carte est une abstraction  réduction sélection mise à plat du monde Elle clarifie oriente rend le territoire lisible Mais pour être utile elle doit trahir  omettre des détails lisser des aspérités transformer l’épaisseur en lignes 

la carte est une promesse de maîtrise.

le territoire lui résiste à cette réduction Il est rugueux changeant imprévisible Il se vit par le corps le temps la fatigue l’erreur Là où la carte anticipe le territoire surprend Là où la carte explique le territoire éprouve

la tension conceptuelle entre carte et territoire rappelle une limite fondamentale de la connaissance aucune représentation ne coïncide avec ce qu’elle représente Confondre la carte avec le territoire c’est oublier le réel au profit de son schéma Refuser la carte c’est s’exposer à l’errance pure

Penser juste consiste à circuler entre les deux  utiliser la carte sans l’idolâtrer marcher le territoire sans renoncer aux repères
























Le réel et son double 


le réel 

est ce qui s’impose sans demander notre accord  

une résistance

une matière un événement qui advient

il est brut parfois opaque

indifférent à nos récits 

le réel ne se justifie pas  il est là et c’est tout





Son double naît aussitôt 










 

image représentation récit souvenir interprétation

le double rend le réel habitable 

il le traduit le déplace l’adoucit ou l’exagère 

il n’est jamais le réel lui-même 

mais une surface où celui-ci se reflète 

déformé stylisé 

rendu partageable



entre le réel et son double se joue l’expérience humaine

trop de réel écrase 

trop de double déréalise


le réel frappe le double répond

le réel blesse parfois  le double soigne ou ment



vivre penser créer 

consiste à maintenir cette tension juste 

ne pas confondre le reflet avec la chose

ne pas refuser l’image qui permet de supporter la chose

là dans cet écart naît la conscience 

comme 


un espace fragile 

entre 

ce qui est 

et ce que nous en faisons



























Cézanne et Hokusai 
ont peint la même vague à des vitesses différentes 

non pas la même eau
mais le même événement du monde saisi
selon deux régimes du temps


















Chez Hokusai la vague est instant critique

point de bascule

forme tendue vers sa propre rupture



Elle est rapide décisive presque calligraphique 

le monde surgit d’un seul geste

comme si le temps avait été comprimé

jusqu’à devenir signe



La vague n’est pas observée elle est reconnue 

déjà là

déjà en train de disparaître







Chez Cézanne la vague  même absente du motif marin 

est lenteur insistante

accumulation de regards

retour obstiné sur la même forme












Le monde ne surgit pas  

il se construit

par couches

par corrections 

par résistances



La vitesse est celle de la perception qui apprend à voir

en se heurtant à ce qu’elle ne comprend pas encore




Ce n’est donc pas la vague qui change

mais le rapport au temps



Hokusai travaille dans un temps rythmique

cyclique

où la forme naît d’un accord profond

entre le geste et le monde




Cézanne travaille dans un temps critique

épais

où 

la forme 

est toujours en retard 

sur ce qu’elle cherche à atteindre





L’un peint à la vitesse du souffle

l’autre à celle du doute


L’un sait avant de tracer

l’autre trace pour savoir



Mais tous deux rencontrent la même chose 

une réalité qui n’est jamais donnée d’un seul coup


La vague est ce qui arrive

entre le monde et l’œil

entre la nature et la conscience

entre le visible et ce qui insiste pour être vu




Ainsi



peindre 
à des vitesses différentes
ce n’est pas représenter autrement 
c’est habiter autrement le temps c’est faire 
de la peinture non une image du monde mais une 
expérience de sa 
durée


























Silice

grain clair du monde solide

squelette discret des pierres et du verre

mémoire fossile de la lumière


dureté patiente

base invisible de tant de formes


prochain mot


Diatomées







architectes microscopiques de verre
cellules solaires dérivant dans l’eau
elles écrivent des géométries invisibles


leur mort devient sédiment et le monde respire à travers elles













vie ondoyante 
poésie à élucider
mouvement sans centre
sens en suspens
le vivant se dit par vagues
la langue hésite
cherche une prise
ce qui coule ne s’explique pas 
cela se déchiffre lentement
par attention






Le chaos érotique du monde         attraction sans loi ni repos


forces mêlées

frictions premières

où 

les corps les idées les astres se cherchent sans se comprendre



désordre fécond

poésie

désir diffus qui met tout en mouvement

à toutes les échelles

à tous les instants