jeudi, décembre 18, 2025


Cézanne et Hokusai 
ont peint la même vague à des vitesses différentes 

non pas la même eau
mais le même événement du monde saisi
selon deux régimes du temps


















Chez Hokusai la vague est instant critique

point de bascule

forme tendue vers sa propre rupture



Elle est rapide décisive presque calligraphique 

le monde surgit d’un seul geste

comme si le temps avait été comprimé

jusqu’à devenir signe



La vague n’est pas observée elle est reconnue 

déjà là

déjà en train de disparaître







Chez Cézanne la vague  même absente du motif marin 

est lenteur insistante

accumulation de regards

retour obstiné sur la même forme












Le monde ne surgit pas  

il se construit

par couches

par corrections 

par résistances



La vitesse est celle de la perception qui apprend à voir

en se heurtant à ce qu’elle ne comprend pas encore




Ce n’est donc pas la vague qui change

mais le rapport au temps



Hokusai travaille dans un temps rythmique

cyclique

où la forme naît d’un accord profond

entre le geste et le monde




Cézanne travaille dans un temps critique

épais

où 

la forme 

est toujours en retard 

sur ce qu’elle cherche à atteindre





L’un peint à la vitesse du souffle

l’autre à celle du doute


L’un sait avant de tracer

l’autre trace pour savoir



Mais tous deux rencontrent la même chose 

une réalité qui n’est jamais donnée d’un seul coup


La vague est ce qui arrive

entre le monde et l’œil

entre la nature et la conscience

entre le visible et ce qui insiste pour être vu




Ainsi



peindre 
à des vitesses différentes
ce n’est pas représenter autrement 
c’est habiter autrement le temps c’est faire 
de la peinture non une image du monde mais une 
expérience de sa 
durée

























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