une dialectique des contraires
Lionel André / promenades / randonnées / arts / littératures / air du temps
samedi, mai 14, 2022
l’Ulysse
de James Joyce a paru à
Paris le 2 février 1922
date symboliquement choisie par l’auteur
car elle était aussi celle de son
quarantième anniversaire
on célébrera prochainement le centenaire de ce monument de la littérature mondiale qui étrangement semble compter aujourd’hui autant de détracteurs que d’admirateurs
un roman illisible dit-on parfois inutilement compliqué fastidieusement cérébral le faux chef-d’oeuvre par excellence…
Avec Beaucoup de jours publié pour la première fois il y a une dizaine d’années Philippe Forest prend et gagne le pari de prouver qu’il n’en est rien et démontre avec aisance et clarté qu’il est possible de lire et de donner à lire un pareil ouvrage
il propose un guide pour ce livre-labyrinthe qu’est Ulysse et en même temps un essai très personnel dans lequel le lecteur qui le souhaite retrouvera l’écho de certains des romans de l’auteur de L’enfant éternel de Sarinagara et du Chat de Schrödinger
car Ulysse est un grand roman qui dans ses dernières lignes fait résonner le splendide oui à la vie de son héroïne un ouvrage toujours aussi actuel qu’essentiel destiné à tous les lecteurs de bonne volonté et qui offre à chacun la chance d’un formidable rendez-vous avec lui-même
je vois
j’écris ces lignes
le visage
rouge du peintre venir à moi
une muraille de tournesols
un formidable embrasement
d’escarbilles d’hyacinthe
opaque et d’herbages
de lapis-lazuli
s’il existe quelque part
une source
dont l’eau procure
l’immortalité
il en est nécessairement ailleurs
une autre qui la reprend
et ainsi de suite...
elle
affronte ainsi l’abîme instauré avec la modernité entre l’inexpugnable besoin d’écrire relancé par des expériences esthétiques indéniables et la mise à l’épreuve de toute tentative de traduction
la question de la vérité est au cœur de ce combat inégal car c’est bien le sentiment de toucher au vrai qui quoique fragile et éphémère parvient lors de moments de grâce à peser contre le plateau de la balance où s’accumulent les raisons de douter de toute vérité que l’on croirait définitivement trouvée
mer et brouillard
comme Médée
la mer
appartient à la mythologie
elle se jette
contre ses récifs
elle bout
elle bout
se contracte dans les ondulations de la lumière
se soulève
pour retomber légère
contre le battant des lames
quand on veut regarder la mer
il est souvent préférable de fermer les yeux
l’Océan
est le premier fils du Ciel et de la Terre
le Temps vient en dernier
il crache
des vagues menaçantes et reprend forme
une éruption d’un genre particulier
un fauve
le point de départ de l’infini est toujours au centre
là où l’esprit demeure
derrière
une image
il y a l’image
le néant est au fondement de l’Être
mis en scène par la poésie
qui réunit érotisme et intellect
il n’est pas la vie
il est vivant
prolepse
toute manœuvre narrative
consistant à raconter ou évoquer d'avance
un événement ultérieur
au point de l'histoire où l'on se trouve
on distingue par ailleurs les prolepses répétitives introduites par des expressions comme nous verrons ou encore pour anticiper qui marquent énonciativement la présence du narrateur ou de l'auteur par épiphrase et qui jouent un rôle d'annonce à destination du lecteur prévenu de l'ellipse temporelle qui va survenir
on verra
plus tard que
pour de toutes autres raisons
le souvenir
de cette impression devait
jouer
un rôle
important dans ma vie
anticipation
objection
prénotion
réfutation
un chuchotement sans parole