Lionel André / promenades / randonnées / arts / littératures / air du temps
mercredi, octobre 30, 2019
une écriture
qui supporte l’infini
les crevasses qui s’étoilent comme le pollen
la lecture
sans pitié des dieux
la lecture
illettrée du désert
une écriture
qui résiste à l’intempérie totale
une écriture
qui puisse se lire jusque dans la mort
poésie verticale
une surprenante
cristallisation verbale
le langage
réduit
à
une goutte de lumière
*
même l’éternité
n’est pas pour toujours
celui qui
a des punaises
celui qui
porte
un soulier
percé sous la pluie
celui qui
veille le cadavre
d’
un pain
avec deux allumettes
celui qui
se prend
un doigt dans la porte
celui qui
n’a pas d’anniversaires
celui qui
a perdu son ombre dans
un incendie
celui qui
ressemble à
un perroquet
celui qui
ressemble à un homme
le pauvre riche
le vrai miséreux
le pauvre pauvre !
un ruban blanc
vert
désir
solitude
à la recherche
d'amis
*
l'éternité
pour ainsi dire
de
l'amitié
montre le
neuf
seul
*
je devrais remercier
Zukofsky
une voix merveilleuse
Zukofsky
vers l'Arbre de Huc
Du Tartare
Sur lequel nous sommes de chaque feuille
la poésie
l'amour se délecte
le livre
des louanges
*
des eaux noires
nuages
réflexions
pour blanchir
la plaque
le calme noir
un ruban blanc
la voie lactée
colline
montagne de l'automne
le monde me cherche
pour ainsi
dire
un
coléoptère
un vert
éclatant
une
touffe
de petites pâquerettes
coiffée de pourpre et sur lesquelles
un
solide chardon sans fleur
jetait
une
ombre
légère et patiente
l'objet
à étudier est considéré
comme
un système complexe
c'est-à-dire qu'il est fonction
d'
une multitude
de paramètres et inclut
des inerties
des non-linéarités
des rétroactions
des récursivités
des seuils
des jeux de fonctionnement
des influences mutuelles de variables
des effets retard
des hystérésis
des émergences
de l'auto-organisation
etc
il est
en relation
avec son milieu
qui l'alimente en entrées
par ex énergie et commandes
et à qui il donne des sorties
par ex. production et déchets
un vaste aqueduc
de pierre rose et surélevé
couvert
d'
une mousse
noire et brillante
une couche
épaisse
un sentier
étroit
un souffle
d'air
une végétation
un bout de chemin
perdu sous le
gazon
une sorte de jetée
ou
une digue
couleur d'encre
sur sa face obscure
Tirer des flèches
Julie Gilbert
Prenant le contrepied des appels commerciaux qui nous inondent, l’auteure a voulu entrer dans l’univers intime d’inconnus en proposant sur son site ou à la billetterie de certains théâtres la possibilité de lui commander un poème.
Les textes écrits pour cette occasion sont une incursion poétique dans le quotidien d’un ou d’une destinataire dont elle ne connaît que le nom et le numéro de téléphone.
Au rythme des lieux, des atmosphères, des paysages et des expériences traversés par Julie Gilbert, une véritable série de “poèmes téléphoniques” s’est construite, dessinant une cartographie d’instants fugaces initialement voués à disparaître.
Tirer des flèches rassemble ces textes, les mets en regard les uns des autres, et donne ainsi à relire et relier cette cartographie à la fois réelle et intime.
Héros-Limite
au-dessus
des
étangs
au-dessus
des
vallées
des
montagnes
des
bois
des
nuages
des
mers
par delà
le soleil
par delà
les éthers
par delà
les confins
des sphères étoilées
mon
esprit
tu te meus avec
agilité
et
comme
un bon nageur
qui se pâme dans l'onde
tu
sillonnes
gaiement l'immensité
profonde
avec
une
indicible
et mâle volupté
envole-toi
bien loin de ces miasmes
morbides
va te purifier
dans
l'air supérieur
et
bois
comme
une pure et divine
liqueur
le feu clair
qui remplit les espaces
limpides
derrière
les ennuis
et les vastes chagrins
qui chargent
de leur poids l'existence
brumeuse
heureux
celui qui peut
d'une aile vigoureuse
s'élancer vers les champs lumineux
et sereins
celui
dont les pensées
comme des alouettes
vers
les cieux
le matin prennent
un libre essor
qui
plane
sur la vie
et comprend sans
effort
le
langage
des fleurs et des choses
muettes !