Lionel André / promenades / randonnées / arts / littératures / air du temps
mardi, juillet 16, 2019
ce travail
est la matérialisation écrite
de mes stratégies
de création
il illustre
mon travail artistique
d'
un point de vue pratique
les artistes expriment leur pensée
par leur travail
et chaque œuvre constitue
une partie du discours
cette œuvre écrite
au départ
avait l'ambition d'aborder et d'éclaircir
les enjeux
d'
un travail à la fois performatif
installatif
sonore et visuel
le résultat est
une pièce qui reprend
sous
une forme littéraire
la même stratégie que j'utilise
dans l'ensemble de mon travail
ce texte
est
un ready-made assisté
et
un travail d'assemblage
le choix en constitue
la modalité principale
mon travail est de choisir
de pointer des phénomènes discrets
qui passent souvent inaperçus
afin de les faire découvrir
à de possibles récepteurs
les propositions
demandent ainsi à être complétées
par eux
mon travail est
une réponse conditionnée
par l'espace et le temps où il se produit
je conçois
difficilement
une production d'objets
qui peuvent être installés
dans
un espace
et
un temps indéterminé
ce travail textuel
n'en fait pas exception
il utilise
l'espace-temps de l'écriture
ses feuilles blanches
son contexte
comme espace de création
voici
un travail composé
de mots qui rêvent de poésie
l'architecte hollandais
Rem Koolhaas
souligne l'importance des mots
en disant que
c'est seulement
par les livres que l'on peut générer
une cohérence aujourd'hui
en ce qui concerne cette œuvre
je n'ai pas d'hésitation
à affirmer que sa cohérence et sa richesse
se trouvent dans l'espace entre les mots
dans les marges qui les entourent
au verso des pages
dans le son qu'elles produisent
quand on les tourne
et surtout,
dans ce moment précis
où
l'on dépose le texte
lève la tête
et prend conscience
de l'espace qui nous entoure
quand soudain
on l'écoute
quand
on quitte la table
et
se met à marcher
trois ou quatre gouttes
de hauteur
n’ont rien à voir avec
la sauvagerie
que
toute amertume
toute animosité
toute colère
toute clameur
toute calomnie et
toute espèce de méchanceté
disparaissent du milieu
de moi
contempler
un simple objet
et contempler
un objet
que l’interprétation a transformé en œuvre
n’est pas du tout la même chose
même
lorsque l’interprétation rend en quelque sorte
l’objet à lui-même
en disant que l’œuvre
est l’objet
*
tous
les objets les mots du monde
sont reliés
entre eux
d’
une manière
ou d’
une autre
ils se touchent les uns les autres
il est neuf heures
le gaz est baissé tout bleu…
je prie dans la nuit
tandis qu’éternelle et adorable profondeur améthyste
tourne à jamais
la flamboyante gloire du Christ
cette machine
à cinq cœurs devra enfanter
le phare
ce phare devra enfanter
l’enfant-Dieu
rappelant
le Jésus des Primitifs
il sera
l’épanouissement divin
de cette machine-mère
comme forme graphique
je le vois machine pure par rapport à
la machine-mère
plus humaine
il devra rayonner de gloire
*
j’ai accès à tout
c’est comme si j’avais à ma disposition
des hangars gigantesques bourrés de
documents
étagères en métal
petite manivelle
je rapproche et j'éloigne les murs d’archives à volonté
mais en version moderne
autrefois
j' allais chercher tout ça à patins à roulettes
fff-fff
1922 1870 1830 1390
en remontant
comme ça
maintenant
c’est à portée de main
la langue à ses idées
j’examine
retiens ou rejette
m’engageant souvent
dans des directions auxquelles
je
n’avais pas pensé
de
sorte que
ce qui se fait au cours
de ce travail est infiniment
plus riche que mon
vague
très vague projet initial
Paul Valéry
maintenait que la parole
plane et courante
vole à sa signification
et que la parole littéraire a pour fin
la volupté
*
le dragon
mon contemporain
m'a dit que les phrases agissent comme
des formules magiques
on
les compose
vaille que vaille et on les range
en pensant qu'elles pourront servir
un jour
commençons par ne parler
de rien
nous finirons par tout
dire
*
Pourquoi suis-je né
?
est
une question
traitée après le repas
c’est-à-dire entre deux repas
dans cet intervalle incertain
comme on s’occupe d’allumer du tabac
et d’en disperser la fumée
par les tuyaux
des narines
trois nuages
trois vies trois pies trois
docteurs
une journée
un lac
une fascination
*
par
une
journée d’été
le fou
pêche dans
un lac
et subit
une fascination
il subit
la fascination de l’eau
la grande
étendue à la surface miroitante
et les nombres l’envahissent
issus des flots
les deux
poches de la vessie natatoire
les quatorze
vessies natatoires extirpées
intactes des entrailles des poissons
capturés
les cinq
corneilles dans le ciel
les vingt-sept
kayaks qui défilent
les trois millions
de vaguelettes
un
martin-pêcheur
qu’en augurer
?
que nagent
dans l’air les bulles
irrégulières libérées de l’obscurité
verte des rochers de schiste
propose-t-il
devant lui
le plan
d’eau en miroir
le fil
ténu comme
un cheveu
le flotteur sensitif
les habitants
de la coulisse des eaux
et
les songeries
se mêlent aux soucis
songeur
il
énumère
les vingt-cinq mille
picaillons
les trois nuages
trois
beau nombre
qui marche en toute occasion
les trente-sept vessies
une brème
trois vies
une vie n’est-ce pas trop peu ?
trois pies
et
un geai
un écureuil roux
une vipère
les neuf
branches principales
du chêne au-dessus de sa tête
onze canetons
les vingt-cinq mille
picaillons m’échappent
du fait de la
sentence
de
trois
docteurs
en philologies diverses
les trois
nuages passent
les neuf branches bougent
la brème replonge
que
d’agitation
dans les nombres
que de métamorphoses
dans les
flots
qu’en augurer
?
je suis d'avis que
je ne puis conserver ma santé
et mes esprits
si
je ne passe au minimum
quatre heures par jour
et le plus souvent davantage
à flâner par les bois
les collines et les champs
entièrement
dégagé de toute préoccupation
matérielle
*
Marcher
c’est donc marcher vers son destin
ce qui suppose
le dépouillement total afin de se retrouver
seul face à soi-même
pour se construire
avec
ce matériau purifié par
la marche
avec
H.D.T
philosophie première
la poésie est comme la musique
qui existe si peu
dont on se passe si facilement
sans elle il manquerait quelque chose
bien qu'on ne puisse dire quoi
on peut
après tout vivre sans le
je-ne-sais-quoi
comme
on peut vivre sans poésie
sans philosophie
sans musique
sans joie et sans amour
La fin de l’État
n’est pas de faire passer les hommes de la condition d’êtres raisonnables à celle de bêtes brutes ou d’automates, mais au contraire il est institué pour que leur âme et leur corps s’acquittent en sûreté de toutes leurs fonctions, pour qu’eux-mêmes usent d’une raison libre, pour qu’ils ne luttent point de haine, de colère ou de ruse, pour qu’ils supportent sans malveillance les uns les autres.
La fin de l’État
est donc en réalité la liberté. […] C’est donc seulement au droit d’agir par son propre décret qu(e l’homme) a renoncé, non au droit de raisonner et de juger ; par suite nul à la vérité ne peut, sans danger pour le droit du souverain, agir contre son décret, mais il peut avec une entière liberté opiner et juger et en conséquence aussi parler, pour qu’il n’aille pas au-delà de la simple parole ou de l’enseignement, et qu’il défende son opinion par la raison seule, non par la ruse, la colère ou la haine.
Aussi s’agira-t-il de poser les limites de l’État et d’en dégager la finalité afin de déterminer ensuite un espace de liberté pour les opinions des sujets.
Spinoza démontre à la fois que la liberté de philosopher est non seulement utile, mais nécessaire à la piété, et que la liberté de philosopher est également utile, mais aussi nécessaire, à la sécurité de l’État.