dimanche, septembre 09, 2018






Il faudrait
pour connaître la vie
et se connaître soi-même
être toujours en train d'écrire

un roman parallèle

Novalis













Copions 

les œuvres que nous aimons
et qui nous ont
façonnés


Reprenons
ce que l'on nous vole
chaque jour un peu plus



je copie

des espaces de lumière
et de pensées

où je peux
me déplacer immobile
et voyant


je copie 

le monde où je vis

le monde


chacun est entré
pour se retrouver et ne pas
se perdre dans l'univers sans fin


































Le penseur est heureux 
lorsqu'il n'a plus 
le choix 

les astres et les vents
l'entourent

rivières

dans le vacarme des eaux
sur les pas du
jour

sur les pas de la
nuit










La première expérience de la pensée 

c'est que nous n'avons pas 

le choix


torrents jaillissants

tandis
que chantent
vent d'Ouest et vent de Sud-Ouest


comme 
une parure 

comme 
les mélodies
du joueur de harpe






























Pensée  séjour d'été

le trait musical placé jusqu'à

la vérité

Mes vers sont hasard

expérience

coup de dés

ma volonté survit intacte


9 septembre

mort de Stéphane Mallarmé











































Ama

le thon en feuille de vigne


c’est une recette 
si ancienne qu’elle est attribuée 
au plus ancien gastronome

Archestrate de Géla 



















Il s’agit d’enfermer 
des morceaux de thon dans des feuilles 
de figuiers 

et de les cuire très délicatement 
sur une grille posée 
sur une braise

Ce plat est 
si bon qu’il est émouvant ! 

Ajouter 
un peu de sel et d’huile 
avant de le déguster

On peut dès lors 
cuire tous les poissons de la sorte

La feuille de figuier protège
conserve l’humidité du poisson
et donne un délicieux 
parfum







Fiore di finochietto selvatico 



durant l’été 
il faut cueillir les sommités 
fleuries du fenouil et les laisser sécher 
lentement à l’abri 
de la lumière


Après plusieurs 
jours 

on frotte les sommités pour 
récupérer 

une poudre d’or très parfumée 
qui servira 

de condiment exceptionnel 
pour 

les mozzarelle
les poissons
les pâtes
etc

































Koiliodaimôn 

signifie donc
ventre-esprit
ou 

ventre-dieu 

c’est-à-dire 

celui qui fait de son ventre 
un esprit 

Daimôn 

a aussi le sens 
de destin et plus précisément 
de partage

L’idée d’un ventre-partage 













Le banquet 
une fois encore est dressé 
mais à la condition qu’il éprouve

ici

l’idée collective 
d’un partage














L’adresse du banquet suppose 
que nous venions avec notre pain 
et nos couverts

Il répond ainsi à cette formule 
que Marcel Broodthaers 
donnait en 1974

lors d’un entretien avec Irmeline Lebeer

à propos de la profusion des coquilles d’œufs 
dans ces œuvres : 

mais sur la table 
où il y a trop 
d’œufs 

il y
manque 
le couteau
la fourchette et l’assiette 

Mais cette absence est fondamentale 
en ce qu’elle permet de 

faire parler l’œuf à table 

ou ajoute-t-il 

pour que le spectateur 
ait une idée originale sur la poule 

Ainsi si l’on vient avec son pain
et ses couverts

c’est pour que puisse se montrer 
l’image 

non pas de quelque chose
mais d’un usage laissé
en suspens


Ici l’usage est double, il est à la fois plastique en tant qu’il fait parler le réel et lui laisse la possibilité d’une teneur poiètique dans l’épreuve d’une adresse avec nous et avec notre étonnement devant ce qui advient et à la fois théorique en tant qu’il affirme, toujours, la nécessité de la puissance du spectateur pour qu’il y ait la possibilité d’un processus artistique. 

Ce que l’idée de l’activité artistique indique est qu’il s’agit toujours d’une manière non pas close et passive d’éprouver un dispositif extérieur, mais au contraire de l’épreuve d’une coréalisation effective. 

Le signe d’une crise sans précédent pour l’activité artistique se trouve dans sa transformation irréductible en objets et en valeurs symboliques caduques et silencieuses. 

Ce silence est infini 
parce qu’il replie l’être 
sur une perte de la connaissance

La connaissance n’est pas 
l’accumulation du savoir mais l’épreuve 
de l’usage de celui-ci

C’est parce que nous confondons toujours l’accumulation et l’usage que nous perdons le sens de l’activité, 

c’est-à-dire de l’agir 
et donc de l’activité artistique. 

C’est pour cela qu’il nous importe toujours de penser que la relation infiniment oubliée et occultée entre aliment et élément est fondamentale.

Elle indique ce que nous refusons de penser et qui est que dans l’usage il nous est impossible d’accumuler : c’est le silence de cette relation qui est inscrit dans la racine des termes aliment et élément. 

Or si nous accumulons nous perdons la possibilité d’une épreuve de l’activité artistique et la teneur de notre vivant matériel. 

C’est cela 
qui est aussi indiqué dans le 
koiliodaimôn.




Fabien Vallos, 

juin 2016



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