mardi, septembre 22, 2015

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Caroline Gold
































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Un anglais en Virginie














avril 1607

écrits du capitaine 
John Smith édités par Edward Arber






ils ont débarqué et n'ont
vu que
des prairies et de grands
arbres

Le cyprès, sur trois
brasses
de racines
s'élevant droit sur
dix-huit ou vingt-cinq mètres
sans une branche

Dans les bois il y avait
cèdres chênes et
noyers
des hêtres ormes
noyers noirs frênes
et sassafras  des
mûriers en
bosquet

Du chèvrefeuille et
d'autres plantes grimpantes suspendues
en grappes sur
de nombreux arbres

Ils piétinèrent
des violettes et d'autres
jolies fleurs
de toutes sortes et de toutes
couleurs
le sol était 
couvert de
fraises
et de framboises


Les merles aux scapulaires
rouges
volaient alentour
et de nombreux petits oiseaux
certains rouges  d'autres bleus


les bois étaient pleins
de cerfs
et partout
de l'eau douce
courait

rigoles ruisselets
sources et ruisseaux

Au crépuscule
à travers les fourrés
et l'herbe haute
se faufilant à quatre
pattes les
sauvages leurs
arcs entre leurs
dents.



Traduction Philippe Blanchon








                                                             Carte par John Smith de la Baie de Chesapeake. 
                                            La Virginie a été découverte et décrite par le Capitaine John Smith 
























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L'oignon le gnon la confiture

H.D.
















venu des plateaux de l'Iran

Connu 
de toutes de tous 
depuis les origines

Les Mongols
les Hébreux la Bible

les Grecs
les Chinois

Platon
Aristophane les Népalais

le Livre 
des morts égyptiens

le Livre 
des morts tibétains



Une plante 
potagère liliacée
comme l'ail la ciboule

la civette
l'échalote la ciboulette

la cive 
en ancien français

à parure 
comestible composée
de plusieurs enveloppes 

qui se prennent
les unes dans les autres

tunique 
sur tunique
à tige souterraine


On prétend 
qu'elle a conservé son arôme

son bouquet
ses relents sa force lacrymogène

à l'ouverture 
des sarcophages
entre les mains racornies des momies

après plusieurs millénaires





Le mot français
est repéré en 1273

et le gnon  superbe raccourci
sort en 1651 des Mazarinades




Le mot est 
aussi rare en poésie

chez Reverdy une fois
chez Cendras trois fois

que le geste répété 
sur les terrains de rugby

deux cent cinquante gnons
lors d'un célèbre match à Wemblay




Oignon
oingnon ongnon  ognon
ouagnon

en provençal 
cebula 

du latin caepulla  de caepa  
oignon



Le jaune de Strasbourg
le très hâtif de Port-Sainte-Marie

le jaune brun de James
le gluant discret de Cavaillon

celui d'Egypte le rocambole




le créole
le géant de Rocca
l'immémorial d'Amiens

le blanc petit 
extra hâtif de Barletta

le blanc 
très hâtif de la Reine

celui d'Espagne


énorme 
pour l'oignon farci
celui de Madère 
très rond


le blanc 
rond dur de Hollande

le rouge globe
pure sphère congénitale

le piriforme 
jaune hâtif allongé



le jaune 
de Cambrai
le rosé de Bonne-Garde
le blanc 
hâtif de Paris



L'oignon,
un ail à une tête
donc de unio en latin

sa corpulence
son mystère sa puanteur

ses pesanteurs 
son chapelet sa tunique

sa gousse
sa pelure 
sa botte 
son miroton ses poches
son bouillon 

ses propriétés rassurantes
ses vertus laxatives
ses vertus diurétiques
le pouvoir plastique de son essence
la forme héréditaire
l'intime connexion de ses parties


Le fritot d'oignon
le hachis d'oignon

la purée d'oignon soubise

Le doré de Parme
le bronzé d'Amposta
le rosé de Roscoff
le rouge de Simiane
le blanc de Naples



Ceux 
que l'on trouve
de mars à septembre 
le barletta, l'élody, le printanier

ceux 
que l'on trouve
d'avril en août 
le gros de Rebouillon

ceux que l'on trouve
en juillet-août 
le radar  
le sonic à gros bulbe ronds

ceux 
que l'on trouve
sur le marché
pour la tarte
la crème le chutney 

Pour 
l'éplucher le hacher
le blanchir l'émincer le manger

Pour
le faire revenir
pour le fricasser

attention 
horreur l'oignon brûler

L'oignon
sa larme à l'infini
l'infini de sa rangée



la douceur de l'omelette

très peu de sel
bien épaisse
bien tassée 
dans une poêle à table profonde
avec une très pointue
pointe de thym

Et aussi
dans la soupe à l'oignon

lui
longuement étouffé
elle rapidement tournée

la goulée 
de champagne
la goutte d'armagnac


Et encore
l'oignonade le confit 

et la nourriture
des légions romaines
celle des savants Chaldéens

le petit oignon frais aux grains de sel



L'oignon
pluriel les oignons


des variétés 
des dimensions
des pellicules des couleurs

le blanc 
nacré
le pourpre 
foncé
le rouge
intense
le jaune
paille
le jaune
cuivré
l'incarnat
l'incarnat très tendre
le rouge
violacé
le saumonais le chamois


L'oignon

la pelure 
d'oignon  le vin

les oignons de Norge

l'ode à l'oignon de Pablo Neruda

et l'oignon 
dans une célèbre toile 
de Picabia




Clouté l'oignon ?

Non
laisser le clou de girofle
vivre sa vie 

parenthèse



Et de nouveau l'oignon


la grosse 
montre pansue

le cor au pied

le cul
se faire casser l'oignon
se le carrer dans l'oignon

occupe-toi 
de tes oignons
c'est pas tes oignons


Et

aux petits oignons

sens positif
sens négatif





La confiture d'oignon




Faire 
revenir à petit feu
dans de l'huile d'olive 
première pression pas trop fruitée

deux kilos d'oignons

bien laisser fondre

il a été mis 
en fines rouelles 
pas haché

Une bonne heure

Ajouter alors
sept cent cinquante
grammes de sucre roux

Mélanger à loisir dans le temps


Joindre

un demi-litre 
de vinaigre fin

de vin

plus 
quelques herbes
un petit piment à bec pointu

Saler
du bout des doigts

Laisser cuire
une solide demi-heure

Se consomme
chaud tiède ou froid

avec

gigot
volaille   l'oie
viandes froides
ou en tartine sur le pain.





Pardonne-moi
ô mon amour
d'aimer les paroles d'amour
plus que l'amour lui-même





Action poétique 158

poèmes
cadeaux
Amour
Amitié

Poésie & Ready-Made





































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Je ne sais 
pas si je crois












ou si je 
ne crois pas aux fantômes, 
mais je dis : 

Vive les fantômes !


Et vous, 

est-ce que vous y croyez aux 
fantômes ? 























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