dimanche, mars 02, 2025

une présence refusée dans le paysage soudain vide 


ce n’est pas 

un cri mais
un râle
un dernier râle sous 
une vague de sang et de musique


nous ne parlons pas pour nous faire comprendre mais simplement à l'intérieur de nous-mêmes avec des socs d'angoisse avec le tranchant d'une obstination acharnée nous retournons nous dénivelons la pensée


la présence de la nuit 

on verra demain


















pouvons-nous
obtenir
un critère
plus précis
du rythme
que celui
que nous avons
de la
couleur





























 

l'être est ensemble   et il n'est pas un ensemble


généralement ce que je préfère ...

c’est m’allonger sur une pente moussue 

les mains croisées derrière la nuque à regarder entre les feuillages mobiles les petits nuages replets courir dans le ciel 

comme je n’aime pas qu’on vienne me déranger sous un prétexte ou un autre je choisis un lieu écarté où personne n’aurait l’idée de fourrer son nez



l'essentiel 
est sans cesse menacé par 
l'insignifiant





















qui veut se souvenir doit se confier à 
l'oubli

à ce risque qu'est
l'oubli absolu 

et à ce beau hasard que devient alors
le souvenir








l'acte poétique consiste à percevoir
non à représenter





le langage est une peau 

je frotte 
mon langage contre
l’autre 

c’est comme si j’avais des mots en guise de doigts 
ou des doigts au bout de mes mots 

mon langage tremble de désir





























le processus qui traverse l’écriture fragmentaire est rendu perceptible par la juxtaposition de variations multiples sur la même thématique  ou au contraire par l’irruption soudaine d’un fragment à l’autre d’une nouvelle idée qui entraîne sur une tout autre voie 


une écriture sismographique enregistrant de près les fluctuations des associations d’idées et d’humeurs de l’auteur 

en reprenant la même question en la faisant varier l’écriture fragmentaire requiert la participation active du lecteur 

il doit lui aussi accepter des brisures de pensée et se voit contraint 

saut par-dessus le vide des lignes blanches oblige  

d’y interposer par les effets de la réception du texte sa propre réflexion sa propre interprétation

le lecteur véritable interprète de l’œuvre fait alors à son tour dévier le sens de la lecture 

on pourrait aussi dire que la lecture à l’évidence interprète le lecteur en favorisant un travail du miroir















l’écriture fragmentaire est donc porteuse de subversion du texte de lectures plurielles invitation à un dialogue polyphonique avec l’auteur et avec soi-même 

la discontinuité de la forme rend cependant la lecture suivie très difficile d’autant que le fragment est le plus souvent bref expression ramassée d’une vérité singulière 

c’est un genre littéraire où les formules percutent par leur musicalité leur puissance d’évocation et agissent avec pugnacité par l’absence de précaution oratoire

de ce fait le lecteur est souvent contraint de marquer un temps d’arrêt

saisi attaqué parfois par un déplacement des évidences communes ou par l’éblouissement d’un accord confondant voire con-fusionnant avec l’auteur


















la parole sans nom sans voix

avec ce seul objet dont le néant s'honore 

Versant Est

elle ne parlait plus que par mots hachés


la source

le support

la semence  latente

la parole sur le bout de la langue

inouïe 

inaudible

impaire

gravide

nulle














chromatismes légendaires

si demain
est promesse
alors
ce soir
est réel



la poésie est une forme de vie

forme 
de vie transmissible
dans le centre 
du céleste empire



























parole 



le silence qui la porte
c’est le souffle  

et 
souffle qui l’emporte
                                                                                                                                               aussi bien 




écriture de crête  écriture en crise
















la phrase de ce poète émerge dans un statut de précarité et de force extrêmes s’instituant au croisement au point d’impact de la force et du sens

au plus près au plus vif du Réel la phrase est sans cesse menacée de disparition d’éclatement côtoyant en permanence ses propres bords  

elle s’affirme cependant en même temps avec un aplomb solaire une puissance telle que les mots sur la page semblent se charger d’une intensité brûlante d’une vigueur et d’une tension quasi orgastiques 

















vent eau pierre


le vent

l'eau

la pierre


seul celui qui a peu de moyens a quelque chose à dire



c’est par le regard qu’on entrera dans cette poésie faute de pouvoir ici suffisamment faire entendre ce qu’elle nous montre sans cesse
















dans cette sorte d’ écriture picturale  on sera convoqué d’abord par l’agencement la composition des mots des phrases rares sur la page blanche  

mots donnés ici à voir comme autant d’éclats de fragments plus ou moins isolés de blocs de bribes de tronçons de langue disposés sur une page dont la présence blanche palpitante s’impose en retour


présence essentielle physique de cette blancheur  

ici 

les blancs 
 
les vides 
les lacunes 
sont très largement donnés 
à voir
à sentir 
à éprouver 

la trace écrite côtoie en permanence ce fond blanc suggérant tout à la fois 

l’espace 
l’immensité
le silence 

présence essentielle de ces blancs qui s’affirment comme 
conséquences d’

une écriture 
sans cesse élaguée 
taillée 
sculptée 

langage délibérément  appauvri  ou du moins fonctionnant volontairement avec très peu de moyens