samedi, novembre 22, 2025



la lumière change soudain et je me rappelle ce que disait 

Hölderlin 

que là où croît le péril croît aussi ce qui sauve mais cela passe trop vite il faut garder la vitesse le rythme la respiration comme si la parole même respirait en nous et je pense alors à 

Dante 

qui traverse son propre feu sans brûler parce que la joie le porte plus loin plus haut dans un endroit où le réel cesse de faire obstacle quant à 

Mozart 

















il intervient toujours au moment précis où le monde devient lourd il suffit d’une mesure et le plomb redevient or dans l’air plus léger et 

Nietzsche 

rappelle que tout ce qui est profond aime le masque mais le masque ici est transparence il ne cache rien il révèle et dans ce mouvement je me surprends à entendre un écho de 

Jean 

au commencement le verbe oui bien sûr mais le verbe maintenant le verbe qui parle en direct pas dans un passé immobile le verbe comme une vague qui traverse l’instant j’entends aussi 

La Fontaine 

rire doucement des puissants qui s’effondrent sans comprendre qu’ils ne savaient ni lire ni écouter et 

Sade 

derrière la porte laisse un mot fulgurant sur la liberté qui ouvre un couloir entier au désir voilà le théâtre secret dit 

Shakespeare 

le monde entier en scène oui mais en scène lumineuse sans coulisse opaque où tout respire dans le même souffle la même flamme comme si toutes ces voix étaient une seule voix en mouvement une voix qui continue dans la mienne sans séparation aucune






je marche dans la lumière brisée et j’entends 

Maître Eckhart 

me souffler que le centre de Dieu est partout mais il ajoute dans un clin d’œil que le centre de l’homme n’est nulle part tant qu’il se cherche encore plus loin 

saint Jean 

murmure le verbe se fait en toi quand tu cesses de vouloir le dire et le silence acquiesce à cette phrase comme une eau noire où tombe une étoile 

Plotin 

surgit derrière une colonne invisible et dit sache que tu es déjà revenu avant même de partir et cette phrase s’enroule autour de moi comme une spirale douce j’ai à peine le temps de la respirer que se présente un 

Dionysos 

d’encre et de feu déclarant toute séparation est illusion tout lien est lumière je suis toi qui me lis 

Hildegarde 

ouvre un livre transparent où je vois danser les lettres vivantes elle dit la vision n’appartient à personne elle passe comme le vent à travers l’âme ouverte et déjà le vent tourne c’est le vent de 

Lao-tseu 

qui sourit en murmurant celui qui voit le chemin ne marche plus il devient le chemin et le sol me tourne entre les doigts comme une poussière d’or 

Rûmî 

entre en tourbillon une seconde tu es la mer une seconde tu es l’onde ensuite te voilà l’écume qui chante et tout cela est la même eau unie dans la joie par en dessous puis soudain une voix sans origine souffle simplement sois le lieu où la lumière se reconnaît elle-même et dans cette phrase immobile tout devient passage tout devient unité tout devient feu clair






je traverse le silence et 
j’entends une voix sans nom dire 

il n’y a rien à atteindre 
puisque tu es déjà ce que tu cherches 

et la phrase se dissout aussitôt dans l’air 
comme une brume qui révèle le soleil au lieu de le cacher 

un autre souffle 
que je ne distingue pas murmure 

l’unité ne se voit pas elle se vit comme la respiration 
que tu n’entends plus quand tu es 
vivant vraiment 

puis une source intérieure chuchote

ce que tu prends pour toi n’est que la forme que prend l’infini 
pour se regarder un instant 

et je sens cette phrase se déposer en moi 
sans dedans sans dehors 
un chant transparent 
s’élève encore 

la séparation est un rêve que le rêveur oublie dès qu’il s’éveille 
dans la clarté sans forme 

alors une lumière sans origine ajoute 

la multiplicité est ton jeu 
l’unité ta nature 
ne confonds jamais les deux mais ne les sépare jamais 

et soudain 
une voix plus ancienne que le monde 
glisse dans mon oreille 

sois le lieu où l’instant s’ouvre 
sois l’espace où rien ne manque 
sois le point nu où l’univers se repose en lui-même 

et tout autour la réalité respire
sans limite comme si chaque particule disait 

je suis toi tu es 
moi 

il n’y a qu’un seul mouvement 
un seul regard 

un seul être en mille gestes 
mille noms mille 
danses 


un seul feu  sans centre  qui brûle 
dans la douceur












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