vendredi, septembre 13, 2024


Ultimatum 

un épisode brûlant qui a d’étranges résonances avec le monde actuel 
absolument nécessaire

faillite générale de tout à cause de tous 

faillite générale de tous à cause de tout 

faillite des peuples et des destins 

faillite totale 


aujourd’hui c’est la guerre

un jeu où on pousse de ce côté et on retient de l’autre 

j’étouffe de n’avoir que ça autour de moi 

laissez-moi respirer 

















ouvrez toutes les fenêtres 

ouvrez plus de fenêtres qu’il n’y a de fenêtres au monde 



hommes nations desseins 

tout est nul 


faillite de tout à cause de tous 

faillite de tous à cause de tout 


complètement totalement intégralement 


chute

krach

déconfiture

fiasco

débâcle

échec

défaite

banqueroute

ruine

culbute

insuccès

cabriole

désastre

éclipse

ratage

plongeon

liquidation

four

déroute

crise

avortement

dépôt de bilan

dette

cessation

carambouillage

baccara

marasme

















une lettre 

à Sophie Liebknecht écrite de prison par 

Rosa Luxemburg 

le 2 mai 1917

Ma très chère petite Sonioucha !

Votre chère lettre est arrivée à point hier, le 1er mai. Avec le soleil qui brille depuis deux jours, elle a fait du bien à mon âme blessée. Ces derniers jours, j’avais bien de la peine, mais maintenant, cela va, cela va aller mieux. Pourvu que le soleil continue à briller ! Je suis presque toute la journée dehors, je flâne dans les buissons, j’examine chaque coin de mon petit jardin, et il trouve plein de trésors. Écoutez bien : hier, 1er mai, j’ai rencontré – devinez qui ? – Une phalène jaune citron étincelante, toute neuve ! J’en ai été si heureuse que mon cœur a tremblé. Elle a volé sur ma manche – je porte une veste mauve, et sans doute a-t-elle été attirée par la couleur – puis elle a folâtré un peu plus haut pour s’enfuir par-dessus le mur. L’après-midi j’ai trouvé trois belles petites plumes différentes : une gris foncé de rouge-queue, une dorée de bruant et une gris jaune de rossignol. Nous avons en effet beaucoup de rossignols par ici, j’en ai entendu un pour la première fois le matin du dimanche de Pâques et depuis il revient chaque jour dans mon petit jardin sur le grand peuplier argenté. J’ai ajouté ces plumes à ma modeste collection dans une jolie petite boîte bleue : elle contient aussi des petites plumes que j’ai trouvées dans la cour de la Barnimstrasse – de pigeons, de poules et aussi une très belle plume bleue, d’un geai de Südende. Ma « collection » est encore minuscule, mais je me plais à la regarder. Je sais déjà à qui j’en ferai cadeau.



















ce matin, 
j’ai trouvé 
juste contre le mur
le long duquel je me promène
bien cachée
une violette 
la seule de mon petit jardin 


comment est-ce chez Goethe 


une violette 

était dans le pré

incognito 

sur elle-même repliée 

c’était 

une charmante violette 


















au-delà du ciel sous la terre


je t’aimais

avant même d’exister


l’obscurité nous a de nouveau mis à la dérive


ma vie

une goutte d’encre dans une nuit sans fin


il n’y a pas de fin

seulement les sommets enneigés des montagnes

















pas 
de mouvements 
sauf de petits mouvements















de nous la mer

n’a cure


il n’y a pas de fin

seuls les glaciers meurent












il n’y a qu’un seul

espace

infini

la frontière lui donne forme


Steger




un soupçon de lune 

pas trop


doux cris de sommeil

nuits chaudes 

noir clair de l’été

l’exactitude obstinée de la mémoire
















toujours aimé les chemins qui ne mènent nulle part 


ce  nulle part  
n'étant pas une utopie mais 
une atopie 
atopie logosophique peut-être  mais toujours 
imprégnée d'

une odeur de feuillage ou d'un goût de sel...


l'atopie 
n'est pas un non-lieu 
mais 
un 

en-dehors  


















les états 
ce sont des lieux de pouvoir
 
un pouvoir 
dans l'état actuel des choses 
de plus en plus difficile à manier 


parler d'un 

en-dehors  de l'état 

c'est parler 

au contraire 

de champs de puissance


















nous 
sommes 
à 

la lune de l'ours noir

la lune où le chien a froid 


c'est la longue journée du soleil mort

quelque part, 

quelqu'un parle

















on n'entend qu'un chuchotement 

on perçoit un ruissellement et tout s'écoule en silence anonyme 

on écoute

on regarde 

on voit des traces  des architraces 

on suit les traces d'un caribou fantôme 

on écoute le vent du nord qui souffle sur les glaces...




néologisme 

préfixe tiré du grec arkhein  arche archie arque commander

désigne la trace première 

celle disparue de l'origine




d’où qu’il vienne 

où qu’il aille 

l’oiseau de mer ne laisse aucune trace


jamais 

il ne perd son chemin