samedi, février 04, 2023






supposez 

qu' un homme 

vive autant dans l’amour des arts plastiques ou de la musique 
qu’il est entraîné par l’esprit 
de la science 




cette supposition de Nietzsche est une des illustrations du Grand style auquel l’auteur conseille à tout homme à s’y engager 

pour Nietzsche qui auparavant distingue chez l’être humain des forces actives et réactives il n’est pas question de supprimer l’une d’elles au profit de l’autre

ce ne serait qu’une réaction de plus 

la proposition nietzschéenne s’inscrit dans l’ordre de l’harmonisation du bon compromis entre la négation de ce qui est et l’action à l’origine de la création 

plus tard Freud s’inscrira dans cette idée de réconciliation en proposant comme remède au déchirement personnel la conciliation des instances au fondement de la personnalité 

mais avant cela Nietzsche poursuit son idée  


il ne lui reste qu’à faire de lui-même un édifice de culture si vaste qu’il soit possible à ces deux puissances d’y habiter quoique à des extrémités éloignées tandis qu’entre elles deux les puissances conciliatrices auront leur domicile pourvu d’une force prédominante pour aplanir en cas de difficulté la lutte qui s’élèverait 


les forces contradictoires sont ainsi neutralisées et cette neutralisation est 

le Grand style

d’ailleurs pour Nietzsche l’homme a tout intérêt à conserver en lui un ennemi intérieur ceci l’obligeant à lutter et donc à s’élever 


en s’opposant l’être humain progresse et si toute opposition est détruite il n’y a plus matière au progrès comme l’explique Nietzsche en faisant le parallèle avec le christianisme et la politique  


l’inimitié est un autre triomphe de notre spiritualisation 

elle consiste à comprendre profondément l’intérêt qu’il y a à avoir des ennemis 

nous autres immoralistes et antichrétiens nous voyons notre intérêt à ce que l’Eglise subsiste 

il en est de même dans la grande politique

une nouvelle création par exemple un nouvel empire a plus besoin d’ennemis que d’amis  


Nietzsche nous dit encore à ce propos  


j’ai déclaré la guerre à l’idéal anémique du christianisme ainsi qu’à tout ce qui le touche de près non point avec l’intention de l’anéantir mais pour mettre fin à sa tyrannie

la continuation de l’idéal chrétien fait partie des choses les plus désirables qui soient ne fût-ce qu’à cause de l’idéal qui veut se faire valoir à côté de lui et peut-être au-dessus de lui car il faut aussi à celui-ci des adversaires et des adversaires rigoureux pour être fort 


ainsi il n’est pas question d’annihiler toute force réactive mais plutôt de les maîtriser pour les exploiter au bénéfice de l’action de prendre appui sur elles pour faire mieux

de ses faiblesses de ses passions désordonnées point de rupture à établir pour l’homme car cela ne créerait qu’un déséquilibre de plus 

la morale nietzschéenne si l’on peut qualifier ainsi l’idée du Grand style est d’être plus fort que ce qui nous affaiblit tout en sachant que nos faiblesses nous obligent à rester éveillés pour y parvenir

cette veille permanente est aussi 

la volonté de puissance autrement dit 

la volonté de volonté 

la volonté désireuse 

de sa propre intensité et qui se traduit par 

la grande santé

celui qui veut toujours se sentir plus fort que ce qu’il est, qui souhaite se dominer toujours un peu plus tout en respectant autrui car la puissance donc il est question est sans rapport avec une domination extérieure celui-là donc se trouve dans

une dynamique vitaliste qui est l’expression de la vie

le Grand style mène à la grande santé

à l’inverse le déchirement des passions épuise en consommant toute énergie vitale

concernant cet épuisement Nietzsche compare le classicisme grec avec le romantisme qui l’insupporte 

selon lui le romantique s’automutile en se déchirant intérieurement

la vie lui échappe en se sollicitant constamment  en étant sans cesse engagé vers son intérieur et par la même occasion détourné du monde des vivants 

Nietzsche cherche alors à réhabiliter le classicisme antique en citant notamment Corneille  


Corneille il faut le réhabiliter comme un de ces poètes appartenant à une civilisation aristocratique qui mettaient leur point d’honneur à soumettre à un concept leur sens peut-être plus vigoureux encore et à imposer aux prétentions brutales des couleurs des sons et des formes la loi d’une intellectualité raffinée et claire

En quoi il était, à ce qu’il me semble la suite des grands Grecs  


le Grand style est également esthétique comme ces statues antiques qui présentent un visage empli de sérénité après que toutes les forces qui animent l’être aient été mises en harmonie en symphonie pourrions-nous dire 

le geste aussi peut être la résultante d’une intégration parfaite des différentes passions entre elles formant une force collective qui devient unitaire dans l’acte pour atteindre la perfection 

l’élégance naît ainsi de cet engagement de toutes les forces sans retenue sans déchirement. 

sans qu’il soit impérativement question d’exploit le Grand style c’est aussi aimer sans haïr préalablement soit de ne pas bâtir un amour sur la haine ni de joie sur la souffrance

cette dernière bien-sûr peut venir mais alors jamais nous n’en serons responsables

c’est déjà beaucoup…




















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