lundi, février 13, 2023


Aurélien Barrau 

comment habiter poétiquement le monde
 

ni 

un drame écologique 

ni 

une crise climatique 

ni 

un délitement social  


une catastrophe civilisationnelle

voilà où nous en sommes



























































ou peut-être
pour le dire comme Jean-Luc Nancy
 
une  maladie de l’esprit  

régime d’aliénation ou d’ensorcellement 

pas seulement intenable
mais également insouhaitable

le techno-solutionnisme rate si profondément la problématique qu’il contribue activement à l’effondrement qu’il feint de vouloir endiguer

l’enjeu est axiologique
ontologique et 
symbolique 

il est donc fondamentalement poétique

non pas accessoirement ou métaphoriquement 
mais principiellement et littéralement.

il est cosmopétique ou
sans doute plus précisément chaopoétique


mais que peut aujourd’hui signifier  
habiter poétiquement le monde 

il faut le faire

cela ne fait plus de doute 

mais qu’est-ce que le faire 

tout à l’inverse d’
une posture vaguement esthétisante ou d’
un fantasme romantico-nostalgique 
il ne peut s’agir 
que d’

une injonction ou d’une exigence 

d’une anxiété aussi

quel commun entre la lecture d’un sonnet de Ronsard et l’élaboration d’un tiers-lieu alternatif qualifié de  poétique 

certainement pas la beauté 

peut-être
au contraire 
une certaine manière 
de n’avoir pas besoin de la beauté 

ou 
ce qui revient au même
un savoir-indexer-le-beau-à-l’existant 

ce qu’on pourrait encore formuler 

jouer Kant contre 
Kant

vagabondage à l’orée de la convenance

en lisère du licite

en vie

habiter poétiquement le monde c’est aussi nécessairement 
et sans doute plus profondément encore  
être poétiquement habité par le monde 

bi-perméabilité

devenir poreux à l’infime

ouvert à l’infection 

gorgé de là


le poiesis est 
un faire

mais l’étymologie 
peut s’avérer trompeuse 


il est aussi 
justement question 
de savoir ne surtout pas faire


non pas de défaire mais de suspendre 

d’interrompre 

de cheminer en syncope de soi

c’est donc d’
une sémio-poiesis qu’il s’agit 

créer des signes

catalyser leur pullulement

être poète ce n’est pas nécessairement écrire  suivant ce régime de précision extrême de rigueur obsessionnelle de connaissance et de transgression des règles qui caractérise le genre littéraire diffus et polymorphe nommé  poésie 


ce serait
au-delà ou en-deçà 
un vœu de subversion 
du banal et de perversion de l’attendu

ce serait 
une connivence avec l’indice 

en affidé du stigmate et complice du symbole

n’avoir plus peur de la prolifération des centres 

s’innerver de la singularité de l’ordinaire

se repaître d’épiphanies continuées

un désenclavement

il serait un peu facile de nommer cela une  esthéthique 

plus explicitement peut-être  

un goût pour l’interstice

un amour du hiatus

un penchant pour la marge


un habiter-la-faille

en tant qu’elle fraye 
une passe résolument vicinale


ne plus voir sans s’émouvoir

ne plus entendre sans s’astreindre 

et s’attendre aux limites du signifié

une exigence une ek-sistance 

une contre-raison qui trahit l’origine et l’héritage

volonté farouche de signifier contre à l’ombre de l’autre

en extase de s’être

renversement du performatif  

l’événement fait la langue

et

finalement 

tout recevoir 
mais ne rien accueillir 
que dans l’inchoatif du toucher 

en bandit du logos 
en pirate du nomos 

avec tact et intransigeance

aux confins du sensible

faire corps avec le monde

faire monde avec les chœurs

sans concession ni indulgence  

un savoir s’étonner à l’aune de l’enfoui 

un percept amoureux















Aurélien Barrau

























 

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