lundi, mai 24, 2021

 

ouvrez les oreilles... 

écoutez

ça ne manque pas de souffle


une langue raison une langue légion une langue dieu dans les langues une langue feu ou à sable une pentecôte et une à litote une langue plaisir et une à gémir une langue beau temps mauvais temps une langue pour tous les temps 



















Le jour de la Pentecôte ils étaient tous ensemble 

dans le même lieu


Tout à coup il vint du ciel 

un bruit comme celui d’

un vent impétueux 

il remplit toute la maison où ils étaient assis


Des langues 

semblables à des langues de feu 

leur apparurent séparées les unes des autres 

et se posèrent sur chacun d’eux 


Ils furent tous remplis du Saint Esprit  

et se mirent à parler en d’autres langues  

selon que l’Esprit leur donnait de s’exprimer 


Or il y avait en séjour à Jérusalem 

des Juifs hommes pieux  

de toutes les nations qui sont sous le ciel 


Au bruit qui eut lieu la multitude accourut  

elle fut confondue parce que chacun les entendait parler dans sa propre langue


Ils étaient tous dans l’étonnement et la surprise  

ils se disaient les uns aux autres 


Voici
ces gens qui parlent ne sont-ils pas tous 
Galiléens 


Et comment 
les entendons-nous 
dans notre propre langue à chacun 
dans notre langue maternelle 


Parthes Mèdes Élamites ceux qui habitent la Mésopotamie la Judée la Cappadoce  le Pont  l’Asie la Phrygie  la Pamphylie  l’Égypte  le territoire de la Libye voisine de Cyrène et ceux qui sont venus de Rome Juifs et prosélytes  Crétois et Arabes  comment les entendons-nous parler dans nos langues des merveilles de Dieu 


















aussi 
quand tout 
d’

un coup 

je trouvais de telles phrases dans l’œuvre d’un autre c’est-à-dire sans plus avoir de scrupules de sévérité sans avoir à me tourmenter je me laissais enfin aller avec délices au goût que j’avais pour elles comme un cuisinier qui pour une fois où il n’a pas à faire la cuisine trouve enfin le temps d’être gourmand


cuisiner




















ce 
chemin champêtre 
d'

une exploration aléatoire


quelques repères

quelques idées 

et toute la poésie du moment 

pour le plaisir

























formée du plaisir 
que j’étais sur le point de goûter
 
je m’imaginais 
que c’était elle qui me l’offrait...





























le goût
celui des papilles  est 
une éducation

le matin 
pour le petit déjeuner, 
elle prépare

un toast avec du fromage fondu
œufs de poisson et 
des feuilles 
de nori


la feuille de nori est cette plaque d'algues déshydratées vertes ou noires qu'on retrouve dans la cuisine japonaise et qu'on utilise généralement pour confectionner des makis  Il s'agit d'algues rouges comestibles qui sont lavées  broyées puis disposées en fines couches pour créer des feuilles d'algues




















le soleil 
se cache derrière 
une nuée qui déforme son ovale 
et dont il jaunit 
la bordure


l’éclat

mais non la clarté

est enlevé 
à la campagne où
toute vie semble suspendue
tandis que le petit village sculpte 
sur le ciel le relief de ses arêtes blanches 
avec 

une précision 
et 
un fini 
accablants




















un peu de vent 

fait envoler 

un corbeau 

qui retombe dans le lointain 

et 

contre 

le ciel blanchissant 

le lointain des bois 
paraît plus bleu comme peint 
dans ces camaïeux qui décorent les trumeaux 
des anciennes 
demeures


*


l'
ombre 
est froide
 
mais 

il existe 
cette petite place 
sur un balconnet de bois 
où le soleil vient s'épuiser pendant 
deux heures

ce lieu précis 
est idéal pour se ressourcer quelques minutes 
en regardant 
les plantes




une nuée

une précision et un fini

un peu de vent et un corbeau






















sauvée 

la duplicité pressante

par doute 

dédoublée

de 

ce qui vient dans la présence

transfigurée 

dans l’oeuvre en simplicité


A peine encore visible indice du sentier

qui au Même assigne

poème et noème


















elle donne 

à penser le repos de la tranquille

figure du vieux 

jardinier 





















...


l'esprit d'un homme peut faire bouger

les autres corps de mille façons


l’agencement des pierres et des sons 

vient régir ce domaine


la poétique est informée  elle informe

disons informe tout court

quand au reste faut voir 


de la pierre à l’humain  

courir dans la vase ralentir le corps 






















une infinité de choses infiniment variées

suivent la divine nature

en étant comme ça



au centre de la vitre

un cercle fixe le jour

il peut ainsi accomplir 

ce qui résulte de sa nature 


elle ignore sa fin

elle est digne d'éloge

pas la peine de développer


ce n’est pas

l’ouverture d’une phrase mais son

inaccomplissement


la poitrine

s’émeut d’une telle force qui

perturbe le bruissement de l’eau


flottement alphabétique d’

un geste enfoui

le corps humain a besoin de nombreux corps

pour être disons le régénérer























les poèmes 
de Claude Royet-Journoud 

nous placent lecteurs dans 
la dramaturgie de ce qui vacille  
ou notre situation dans la langue face au monde 
































L’usage et les attributs du coeur est une exploration minutieuse des états d’émotion dans la langue et à travers l’écriture des mots. Le lyrisme du poème n’est pas dans l’ivresse du langage mais plutôt dans la dépossession, l’absence à soi-même, les jeux aléatoires de la langue. Mais la question est toujours la même : le récit possible du réel. Le récit et son énigme quand il a recours au vers, au poème. Le livre se fait enquête perpétuelle. L’auteur réunit des indices. Et à l’intérieur des failles, qui sont aussi une architecture, il esquisse une fable. Il s’agit en réalité d’un seul texte, et non simplement une suite de poèmes. D’une histoire à naître, à découvrir. Le vers est un miroir. Il se reflète et se transporte dans un autre poème sans pour autant perdre son identité. D’où cette attention aux petits mots de la langue, aux articulations, aux prépositions qui détournent le « courant » et permettent ainsi au poème de se reformer dans un espace inédit. Les mots du poète sont autant de stigmates d’une langue en quête du monde, des émotions, des « attributs du coeur ». Logique du moindre, de l’imperceptible, de l’accidentel.





c’est alors que se pose la question 

de la naissance

de l’anatomie

c’est-à-dire 

l’action de couper pour voir

Jackie Pigeaud

*

LUELADC


















Henri Matisse  

Nu aux oranges  

1952






















pourquoi je ne mets pas d’yeux
quelquefois  ni de bouche à mes personnages 

? 

mais c’est parce que le visage humain est anonyme  Parce que l’expression porte dans tout le tableau  Les bras les jambes tout cela ce sont des lignes qui agissent comme dans un orchestre  un registre  des mouvements  des timbres différents  Si on met des yeux  un nez  une bouche  ça n’a pas grande utilité au contraire  ça paralyse l’imagination du spectateur et ça oblige à voir une personne d’une certaine forme  une certaine ressemblance etc  tandis que si vous donnez des lignes  des valeurs  des forces  eh bien son esprit part à travers ça et alors   l’imagination est délivrée de toute limite










Henri Matisse 

Katia à la chemise jaune 

1951