vendredi, mars 05, 2021

le temps passe 

en spirale 
en entrelacs
en engrenage
en réseau
en rond
en labyrinthe 
en tissu
en chaîne
en toile d'araignée 
en complication
en résille
en n’importe quelle forme 
qui ne soit ni droite ni orientée

écrire ici 

c’est 
repasser toujours
par les mêmes points
oublier l’exigence d’avancer vers 
quelque part































nous saisissons tout à présent

amour sommeil mort voilà l'unique plan









elle dit
avec pudeur
ce qui nous traverse ou ce qui nous obsède
dans l’obscurité de la nuit

une écriture dans la marge

la lumière s’efface
la poussière s’évanouit 

un éclat pâle d’eau tiède




bleue 
comme 
une orange

douce ou amère en est la peau

voici la mer  verte et claire
voici mille cailloux  
voici mille yeux
voici les vagues




nos cris et 
nos souffles se prolongent dans le mouvement de 
nos corps  l’air qu’on brasse
nos ombres évanescentes































repasser 

par le même point c’est déjà 

un mouvement


de ce côté du fleuve 

tout ce qui m' intéresse suit la même 

mécanique



chacun s'absorbe dans la mastication

personne ne regarde






















l'ombre que provisoirement tu nommes 

auteur 

prend tout juste la peine de décrire 

comment l'inconnue 

a tout arrangé 

pour son moment Atlantide




nos rêves 
sont priés de prendre 

une douche froide

un 
petit objet 
d'

une centaine 
de pages non-numérotées

des pages au trois-quart vides

texte toujours isolé tout en haut de la page
sans jamais regarder vers le bas 
et toujours aligné sur 
la marge extérieure

Benoît Jeantet 
écrit 

:


la brume 

est revenue peser sur le monde

avec son humeur de cavalier 

fourbu


elle disait souvent 

qu'après 

une nuit trop courte

parfois l'espace 

hésite




il y a 

quelques similitudes 
entre 

naître s'endormir mourir ou franchir 

une frontière 
dans le brouillard






















ce qu'elle enseigne est déjà en moi-même

pensée-poésie inépuisable 

que je scrute sans voir


si 

le cœur concentré je veux la saisir

feuille effrayée d'automne

elle tombe dans le vide


*




















un regard 

d'horizon pour les cols

un regard 

de ciel pour les cimes


haut et bas proche et lointain

ne se ressemblent pas


j'ignore le vrai visage du mont Lou

je sais seulement que j'y suis


Su Dongpo



















Cerf Noir 

:

alors 
j'étais debout 
sur la plus haute montagne 
et au-dessus de moi tout autour se trouvait 

le cercle complet du monde

et pendant 
que j'étais debout là-haut  
je vis plus que je ne puis raconter 
et je compris plus que 
je ne vis 































car j'étais en train de voir d'une manière sacrée les formes de toutes choses en l'Esprit  et la forme de toutes les formes telles qu'elles doivent vivre ensemble comme un seul être 

et je vis que le cercle sacré de mon peuple était l'un des nombreux cercles qui n'en font qu'un  aussi étendu que la lumière du jour et la lumière des étoiles  et en son centre grandit un puissant arbre fleurissant pour abriter tous les enfants d'une seule mère et d'un seul père

et je vis que c'était sacré


*



















notre cerveau 
reçoit en permanence 
un nombre phénoménal d'informations

notre cerveau reçoit environ 
400 milliards de bits par seconde
tandis que le conscient ne traite qu’environ 
2000 bits/seconde

soit 
1/200.000.000ème 
de l’ensemble de nos perceptions 

la question logique 
que l’on peut se poser 
est 


y aurait-il 
des informations utiles 
parmi cette masse de centaines 
de milliards de bits qui ne franchissent pas 
le seuil de notre conscience 

?


































n’entre pas sans violence dans cette 

bonne nuit

le vieil âge devrait brûler et s’emporter 

à la chute du jour
















rager 

s’enrager contre la mort 

de la lumière


bien que les hommes sages à leur fin 

sachent que l’obscur est mérité

parce que leurs paroles 

n’ont fourché nul éclair ils

n’entrent pas docilement dans cette 

bonne nuit


les hommes bons

passée la dernière vague  criant combien 

clairs

leurs actes frêles 

auraient pu danser en une verte baie

ragent

s’enragent contre la mort de la lumière


les hommes violents qui prient et chantèrent 

le soleil en plein vol

et apprenant

trop tard qu’ils l’ont affligé 

dans sa course

n’entrent pas docilement dans cette 

bonne nuit



les hommes graves près de mourir

qui voient de vue aveuglante

que leurs yeux aveugles pourraient briller 

comme météores et s’égayer

ragent 

s’enragent contre la mort de la lumière



et toi mon père

ici sur la triste élévation

maudis

bénis-moi à présent avec tes larmes violentes

je t’en prie

n’entre pas sans violence 

dans cette bonne nuit

rage

enrage contre la mort de la lumière


Dylan Thomas

Vision et Prière et autres poèmes 


Do not go 

gentle into that good night


Old age 

should burn and rave at close of day 


Rage  

rage against the dying of the light


Though wise men 

at their end know dark is right


Because their words 

had forked no lightning they


Do  not go 

gentle into that good night


Good men 

the last wave by  crying how bright


Their frail deeds 

might have danced in a green bay


Rage 

rage against the dying of the light


Wild men who 

caught and sang the sun in flight


And learn  too late

they grieved it on its way


Do not go 

gentle into that good night


Grave men  near death  

who see with blinding sight


Blind eyes 

could blaze like meteors and be gay


Rage  

rage against the dying of the light


And you  my father 

there  on the sad height


Curse bless me 

now with your fierce tears I pray


Do not go 

gentle into that good night


Rage 

rage against the dying of the light


*


RAGE 
Interstellar poem 
with Anthony Hopkins



















Linda Lynch

vélocité envahissante

de la vitesse envahissante du goutte-à-goutte


rocher brûlant à peine 


 


dentelle de fumerolles tapotées


un cœur


disparu


vide


*



que se passe-t-il lorsque nous lisons

des choses ou des personnes qui ne sont pas là 

apparaissent 

les images surgissent dans l'esprit


une image 

est 

une goutte 

de pensée sous forme d'encre

une vapeur 

intemporelle filée de soie 

l'
esprit peut
en 

un mot ou une chaîne de mots

aller aussi loin qu'il le souhaite 


la lecture est délicate comme la chirurgie

la cage thoracique a été ouverte


un gros organe 

rouge 
palpite
à 

un rythme spasmodique


nos pensées se tournent 

vers le monde de l'effort intellectuel