lundi, juin 22, 2020



j'entasse du révolu

qui a accompli
 parcouru son cycle

qui est écoulé
achevé

qui est passé 
fini
disparu 

ne cesse d'en fabriquer et d'y précipiter

le présent

sans lui donner le loisir d'épuiser

sa propre durée











VIVRE

c'est subir la magie du possible

mais

lorsqu'on perçoit

dans le possible même

du révolu à venir

tout devient virtuellement passé

et

il n'y a plus de présent 

ni de futur



ce que je distingue dans chaque instant

c'est son essoufflement 

et son râle

et non la transition 

vers 

un autre instant




j'élabore 

du temps mort


je me vautre 

dans l'asphyxie du devenir








































le noir parler

parler noir ou langue noire 

Black Speech

une des langues 
construites et conçues 
par l'écrivain et philologue 

J. R. R. Tolkien 










dans 
le cadre des récits 
de la 

Terre du Milieu

il s'agit de la langue de Sauron 

le Seigneur des Ténèbres et de ses serviteurs 

la quasi-totalité du corpus connu de cette langue 
apparaît 
dans 

Le Seigneur des anneaux 

il 
se compose 
d'

une phrase

l'inscription gravée sur l'Anneau unique
et de quelques mots et noms 
isolés

.

Ash nazg durbatulûk, ash nazg gimbatul,
Ash nazg thrakatulûk agh burzum-ishi krimpatul

Trois 
Anneaux 
pour les Rois Elfes sous le ciel

Sept 
pour les Seigneurs 
Nains dans leurs demeures de pierre

Neuf 
pour les Hommes Mortels destinés 
au trépas

Un 
pour le Seigneur Ténébreux sur son 
sombre trône

dans 
le Pays de Mordor où s'étendent 
les Ombres

Un 
Anneau 
pour les gouverner tous

Un 
Anneau 
pour les trouver


Un 
Anneau
pour les amener tous

et 
dans
les ténèbres 

les lier
Au Pays de Mordor où s'étendent 
les Ombres 




































les autres tombent dans le temps

je suis 
moi

tombé du temps



à l'éternité qui 
s'érigeait au-dessus de lui 

succède cette autre 
qui se place au-dessous

zone 
stérile où l'on n'éprouve plus 
qu'

un seul désir 









réintégrer le temps 

s'y élever coûte que coûte 

s'en approprier 

une parcelle 

pour s'y installer

pour se donner 

l'
illusion 
d'

un chez-soi


mais 
le temps est clos 

mais 
le temps est hors d'atteinte 

et 

c'est 
de l'impossibilité d'y pénétrer qu'est faite cette éternité 
négative

cette mauvaise 
éternité
































j'ai beau m'agripper aux instants 

les instants se dérobent 


il n'en est 

aucun qui ne me soit hostile

qui ne me récuse

et ne me signifie son refus 

de se commettre 

avec moi




tous inabordables

ils proclament l'un après l'autre mon isolement 

et ma défaite











je 

ne peux agir que si 

je me sens porté 

et protégé 

par eux




quand 
ils me délaissent

je
manque du ressort indispensable à la production 
d'

un acte 

qu'il soit capital ou quelconque 




démuni

sans assise nulle part


j'
affronte
alors 

un malheur inusité 

qui n'est pas usité
utilisé 
en usage

qui ne s'emploie jamais 
ou presque jamais

qui n'est pas
habituel




celui 
de n'avoir pas droit 
au temps




































Au blanc

on 
rassemble 

on 
rectifie 

on
corrige

on
réforme

on 
amende







on
redresse

on 
nettoie 

on 
assemble

on 
structure 

on 
met de l'ordre




































Tolkien 
n'aimait pas l'allégorie
il la considérait comme 

un genre stérile et prévisible

Pourtant  nombre de ses lecteurs ayant lu le Seigneur des Anneaux n'ont pas pu résister à la tentation et se sont livrés à toutes sortes d'interprétations  dont les plus populaires font apparaître ce livre comme 







une symbolique chrétienne 

ou comme 

une allégorie 

des deux grandes guerres du 20ème siècle

Tout comme l'œuvre d'origine  la version cinématographique du Seigneur des Anneaux a inspiré de nombreuses spéculations  qui pour la plupart tentent de la mettre en parallèle avec notre réalité contemporaine 

La grande majorité des commentaires avancés jusqu'à présent ne fait que dénaturer l'essence même de la quête du Seigneur des Anneaux et de ses enseignements sur le Mal

Dans la vague des atrocités du 11 septembre  nombreux sont les critiques ayant découvert des rapprochements entre le Seigneur des Anneaux et l'Amérique

Le but ici n'est pas de pourchasser  ni de punir l'ennemi  mais de détruire l'objet qui pourrait lui donner le pouvoir absolu

Il existe bien certains parallèles

Ces drames mettent tous les deux en scène de simples citoyens et leurs dirigeants  soustraits à leurs vies ordinaires par 

un Mal pernicieux


Après 

un choc initial  

ils décident de faire cause commune et finissent par découvrir qu'ils possèdent en eux des ressources inespérées

Il existe également

une similitude 

entre la manière dont toutes ces personnes  sans oublier leurs terres d'origine  mettent de côté leurs divergences pour lutter contre 

un ennemi commun

Pourtant cette comparaison ne fait qu'obscurcir la nature même de la quête du Seigneur des Anneaux et du mal particulier que renferme l'Anneau

Le but ici n'est pas de pourchasser ni de punir l'ennemi  mais de détruire l'objet qui pourrait lui donner le pouvoir absolu

De plus  les dangers qu'affrontent les porteurs de l'Anneau sont tout autant intérieurs qu'extérieurs

Certains membres de la Communauté de l'Anneau sont en effet tentés par l'attrait qu'offre ce dernier les raisons qui les motivent étant très variées  mais provenant invariablement d'

un désir de faire le bien

Le personnage le plus tragique est celui de Boromir l'un des deux membres humains de la Communauté  qui désire utiliser le pouvoir de l'Anneau pour défendre son peuple contre le maléfique Sauron

Son désir de posséder l'Anneau est tel qu'il entraînera sa mort et la dissolution de la Communauté

La grande leçon du Seigneur des Anneaux est que l'usage de certains moyens ou instruments est intrinsèquement mal et corrompt celui qui les emploie et ce  quelque soit le bien éventuel qui pourrait en résulter ou qui motive leur usage.

L'enseignement du Seigneur des Anneaux au sujet du Mal va à l'encontre des idées reçues

Il s'oppose aux a priori que rien n'est vraiment mal en soi

Quand Elvis Mitchell  critique au New York Times  décrit l'Anneau comme étant si puissant que même l'éminent Gandalf en a peur  il inverse les données du problème

C'est justement parce que Gandalf est profondément conscient du réel pouvoir corrupteur de l'Anneau qu'il le craint

Il sait que l'Anneau risque de persuader les puissants qu'ils sont capables de maîtriser son pouvoir avant que l'Anneau ne les détruise

On arrive facilement à cette conclusion dès l'

une des premières scènes

lorsque Frodon  réalisant que la possession de l'Anneau fait de lui 

une cible facile 

pour les forces du Mal veut le confier à Gandalf


Le magicien qui jusqu'alors apparaît comme 

un personnage enjoué 

et paternel  devient soudainement brutal à l'égard de Frodon et lui ordonne de ne pas le tenter avec l'Anneau

Gandalf, qui ne touchera même pas à l'Anneau  reconnaît que  malgré son désir profond de faire le Bien  sa possession de l'Anneau n'occasionnerait qu'

un grand et terrible Mal

L'enseignement du Seigneur des Anneaux au sujet du Mal va à l'encontre des idées reçues

Il s'oppose aux a priori que rien n'est vraiment mal en soi 

que seuls les individus faibles et ignorants sont terrifiés par des choses considérées comme  mal 

et que des individus intelligents animés de bonnes intentions  peuvent employer n'importe quels moyens pour atteindre 

un bien ultime



Une autre interprétation 

celle que les acteurs et le producteur Peter Jackson  semblent préférer 
est de nature écologique

Elle prétend que la distinction entre le bien et le mal repose sur diverses relations à la nature

Selon elle  le bien existe en harmonie avec la nature  alors que le mal qui lui est indifférent et même hostile  utilise la nature  comme 

un matériau de base 

pour satisfaire sa cupidité et ses ambitions au pouvoir démesurées

Le plus grand danger qui nous menace n'est pas la déperdition des ressources naturelles  mais la dégénérescence morale de l'espèce humaine

Cette interprétation est soutenue par le film et peut-être encore plus par le livre

La cupidité est de toute évidence 

un mal impardonnable 

dans le Seigneur des Anneaux où l'attrait des Nains pour les richesses dans les mines de Moria réveille 

un mal ancestral

On peut également se remémorer la scène où Saroumane  le magicien perfide  ancien ami de Gandalf et maintenant son adversaire  ordonne à ses serviteurs d'abattre des arbres pour alimenter 

un feu 

qui doit lui servir à façonner 

une nouvelle créature

mi-homme mi-Orque.

Il s'ensuit 

une prise de vues 

sur la déforestation massive.

Toutefois  l'interprétation écologique  surtout si elle est perçue de manière classique et libérale n'atteint pas l'essentiel

Le plus grand danger qui nous menace n'est pas la déperdition des ressources naturelles  mais la dégénérescence morale de l'espèce humaine

Les héros de Tolkien ne sont pas des créatures indépendantes  elles acceptent 

un rôle

au sein de l'ordre naturel et même surnaturel, qu'elles n'ont pas choisies.

Le projet de clonage de Saroumane  sa tentative de recréer la vie à sa propre image et ressemblance ou tout au moins pour satisfaire ses ambitions  reflète le projet même de Sauron qui est animé d'

une  volonté de dominer toute vie 

Existe-t-il 

une analogie 

contemporaine à cela ?

Bien sûr.

Elle est déjà amorcée à travers la proclamation d'

une liberté sexuelle désincarnée

dans la pratique de l'avortement, et dans la pression en faveur d'

une plus grande liberté 

pour les manipulations génétiques  incluant même le clonage

Bien évidemment  ces projets ne sont pas menés à la manière de Sauron  avec l'intention maléfique de dominer le monde  mais en se réclamant du progrès  de la compassion et de la liberté

Pourtant  si nous prenons au sérieux les enseignements du Seigneur des Anneaux nous réalisons que même les meilleures intentions ne sont pas 

une garantie 

pour nous empêcher d'engendrer 

un grand et terrible mal