Traduire
nous partons
de la coupure entre ce qui peut parler et ce qui
ne peut pas parler
nous partons nous coupons
d’avec cette vieille partition
où le langage
sépare
les degrés de division
de coupure sont le propre de la langue
nous avons divisé
par la langue
entre
le soi et l’autre
entre
nous et eux
entre
les nationaux et les étrangers
c’est la langue
en soi
qui nous empêche
de réinventer nos modes d’habitation
d’élargir
d’étendre
de transformer nos communautés
de savoir
nos régimes
de pouvoir
nous proposons
de substituer aux langues
outils
de séparation
de domination
une autre capacité humaine
non plus la capacité
de parler mais la capacité
de traduire
si
nous
nous projetons
potentiellement
dans le monde
non comme locuteur
mais comme traducteur
si
nous reconnaissons
ce qui est propre aux humains
non pas comme le fait de parler
mais de traduire
nous
ne sommes plus
au-dessus des choses
mais
parmi elles
entre elles
à l’endroit même du conflit
ce qui signifie
l’adoption de la traduction comme langue
c’est d’abord l’acceptation que tout parle
que seule notre capacité d’entendre
autrement dit
de traduire
est limitée
dans
une relation potentielle
si plutôt qu’être
parlants
nous sommes traducteurs
nous cessons
d’être des entités dominantes
et des communautés de mêmes
nous devenons
de fait
des communautés
d’entre-autres
notre position
de prédation est modifiée
puisque notre langue
fixant notre tâche
consiste à étendre nos capacités d’écoute
de traduction à tout ce qui parle
nous ne sommes plus alors
des sujets imposés
imposants
nous sommes
ce par quoi tout ce qui était vu comme objet
peut accéder à la dignité de sujet
c’est-à-dire être traduit
nous sommes
les traducteurs potentiels
de toutes les relations
il faut imaginer Noé déçu…
in
les Potentiels du temps
art & politique
*
j’écris
je passe
de l’autre côté de mon nom
le pas encore et le déjà-plus se
confondent
j’écris
je réalise
ma mort
l’usure est usée
pourtant
ici même
voici du fait
il restera toujours à l’user
la pensée
de la mort est fuyante
comme
le possible
certains oiseaux de la phrase
reviennent en arrière
et prennent
un nouveau sens
ainsi
de la sitelle torchepot
cet oiseau
bouleversant parfaite phrase
dans les arbres
qu’il descend tête en bas
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