dimanche, janvier 10, 2016

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Théophile Chenevrier

Modifications
corporelles    cire










Hybride : 

généralement conçu comme synthèse d’éléments hétérogènes, mais une idée beaucoup plus dynamique et … électrique en a été formulée par l’éditorialiste du n°2 de Nouvelles hybrides : « elles sont bien une sorte d’archipel, mais indénombrable et dont les îles éphémères sont des fulgurances, des éclats de conscience qui, dans l’espace que crée ce genre d’instant, abolissent tous les pays, et qu’on n’est jamais sûr de retrouver. Entre les quelques parcours obligés qui nous cachent l’immense du monde et l’infiniment libre de la vie, il y a, parfois, des passages qui s’ouvrent et mettent en communication instantanée des lieux mentaux que l’on ne pourrait joindre, « normalement », que par de longs détours, ou pas du tout : la girafe se couvre des piquants du hérisson, le cor de chasse prend feu, la peinture disparaît dans le paysage, le peintre dans la peinture, le piment devient libellule, la langue poisson rouge, les esprits portent des chapeaux, un dé à coudre rencontre un parapluie, le rêve lourd jambon pend au plafond au-dessus d’un fantôme de nous-même qui s’étend sur le lit du blanc de l’œil, le coucou est remplacé par l’horloge à escarpolette, qui marque le temps suspendu, les bancs de poissons reflètent les haies de mésanges, les peupliers sont des flammes vertes, il y a une rue du Cul-de-sac, une avenue de l’Impasse, le temps n’a pas encore de barbe, les lettres du blanc sur les bandes du vieux billard évoquent les lettres du blanc sur les bandes du vieux pillard, Rrose Sélavy et moi esquivons les ecchymoses des esquimaux aux coups exquis, … ces « images » sont des hybrides, et ces hybrides sont des unificateurs inattendus, opèrent la fusion instantanée de termes que nous n’aurions jamais pensé à seulement rapprocher, et leur découverte (par soi-même ou grâce à d’autres, beaucoup moins importe que généralement on ne croît) est de très loin la plus efficace et la plus réelle des résurrectines : comme remède instantané à l’ennui, on fait d’autant moins mieux que cette poésie est souvent drôle, ou même, comme aurait dit Baudelaire (qui n’y connaissait pas rien) très-drôle. Les nouveaux hybrides sont des atolls viagresques pour nos facultés d’émerveillement et de rire, dont les médecins des âmes devraient prescrire la recherche à leurs patients (sans oublier de commencer par eux-mêmes) : ce sont des fusées qui déclenchent des évasions instantanées (nous avons nous -aussi remarqué qu’il y a un instant c’étaient des atolls, mais … comment parler des images autrement qu’avec des images ?) vers des ailleurs hors du réel et du possible, même, des ailleurs innombrables qui ne sont pas des quelque part (Le gang des philosophes para-bavarrois à chaussures cloutées soutient que les bêlements d’êêêtre de la poésie permettent de résoudre la crise métaphysicosmique du logement, mais c’est oublier qu’il n’y a pas seulement l’être, le non être, ou les moutons). Les Nouvelles Hybrides sont un là-bas qui n’est pas un autre ici, un entremonde en archipel infini qui n’est ni dans ce monde ni dans un autre mais dans le va-et-vient perpétuel qui en relie les innombrables atomes. Elles forment la trame infinitésimale des recommencements du monde. Nous ne les avons pas découvertes, ni ne sommes les premiers à entreprendre de les explorer : nous venons après Lichtenberg, Jean-Paul, Grandville, Hugo, Aloysius Bertrand, Baudelaire, Ducasse, Rimbaud, Laforgue, Roussel, Duchamp, Apollinaire, Arp, Ernst, Breton, Styrsky, Toyen, Dali, Queneau, Chazal, Perec et tant d’autres géniaux arpenteurs de ce non-monde d’ombres vives, mais la conscience s’est perdue de l’aventure commune à laquelle ils ont participé, et même s’il n’est pas très étonnant qu’on ne cesse de la perdre, car elle est celle du désir de la discontinuité absolue, du tout autre, du jamais vu, jamais ouï, jamais pensé, nous voudrions contribuer à la retrouver, à la reconstituer. L’incompréhension est telle aujourd’hui de tout ce qui est haute poésie, art absolu, humour, amour, épiphanies burlesques, fausse mystification, philosophie par la folie ou gai savoir par l’ignorance qu’il ne sera peut-être pas inutile de montrer qu’il existe encore des chercheurs de l’or de ces illuminations-là, que l’aventure continue, de la recherche des mondes sans gravité que ce désir commande, que certains d’entre nous ont encore faim du sandwich symbolique qui ne ressemble à rien. Les hybrides auxquels tout le monde pense lorsqu’on prononce ce mot nous intéressent aussi, mais ils ne sont à nos yeux qu’une petite partie d’un univers infiniment plus vaste, et une partie extrêmement problématique. Est-ce que, par exemple, « hybride » est synonyme de « monstre » ? Si non, en quoi, et pourquoi ? Est-ce que tous les hybrides sont également fascinants ? Si l’on parle de « Nouvelles hybrides », c’est qu’il y en a des anciennes : quelles ? et qu’est-ce qui les différencie ? »

Nouvelles-Hybrides












pierre-poils

collectif composite

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j'aime 
beaucoup ce petit 
bracelet... 










cette mince 
chaîne à votre cou... 

ces 
petits bijoux de 
rien... 


C'est un éléphant 

oui... un éléphant

une clochette

un sabot... .



Il avait 
envie d'aller jusqu'au
coffre

d'en faire jouer 
la mécanique et de contempler 
les bijoux

les colliers

les anneaux

les perles

les pendeloques

les bracelets

les boucles

les joyaux 
et les barres de métal 
rare

les pierres nues 
dans de petits sachets




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Petit objet 
servant à la parure
précieux par sa matière

ici































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Étant donné
49 : le crâne de Freud 










la dure réalité qui t’électrifie
te regarde et t’observe
vers le tas de bois et de cartons
en bas vers les désirs
le ralenti dans ton cerveau
depuis le temps
qu’il y a des trous
des roues dentées
position fœtale à reculons
en plongée élévatrice
cet escargot se vide et s’endort
dans le manège des spectres
toujours aussi vite
lentement
tu nages à moitié
projeté en circulation
courant d’enroulement
augmentant lentement
deux fois plus lentement
que le vilebrequin 





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Pour précipiter les coïncidences, pour recevoir les fruits du hasard, une méthode : la dérive. « Tout mouvement nous découvre » écrivait Montaigne. Dans cette dynamique d’une flânerie urbaine soumise aux bords de rues : la nuit, longer les murs en portant à ces derniers une attention photographique qui s’attache plus spécifiquement aux interstices, aux visions à travers les grands verres et par les petits trous. Créer ensuite une série de textes génératifs, buissonniers, fugitifs, échappés du troupeau de la langue domestique, conçus comme un dialogue singulier, entre l’image et le mot. 


Étant Donnés, 
Céline Brun-Picard & Grégory Haleux, 
Editions Cynthia 3000, 2007. 

Liminaire séance 216

ici
































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#Ulysse 1431


Un tigré sage
un sphinx épileptique
veille sur son rebord tiède.

Dommage de les déranger.


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la phrase originale

progression 
et position géographique

ici

































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