lundi, février 29, 2016

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Sam Francis 

To Hölderlin, 1952. 

Watercolor on paper, 

49.8 x 65 cm































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« I jour
mon père il pose son sac contre la porte 


















I jour
il part tous les matins travailler 

I jour
il prend le bus pour Denain 

I jour
il jour il me ramène des bonbons de l’usine 

I jour
il balance sa canette sous la table 

I jour
ma tante se fout de sa poire 

I jour
il ramène que son pinard des courses 

I jour
je le vois en bas de la rue neuve 

I jour
ma mère planque les bouteilles 

I jour
ma sœur dit qu’il est gentil 

I jour
ma mère elle lui sert à ras bord » 


Un jour , 
Charles Pennequin, éditions Derrière la salle de bain, 
collection Poésie électrique, 2003, p.14. 



C’est un tout petit livre à la couverture bleu, si petit qu’on a presque du mal à le tenir entre nos mains. On l’ouvre et là, c’est la surprise. Le titre : "1 jour", se répète sur la page presque nue, on dirait qu’il se répète à l’infini. Quelques pages et pourtant très vite les phrases de ce livre nous entêtent pour ne plus nous quitter. Elles nous accompagnent littéralement. Cette vie c’est notre vie. Ces jours qui défilent au fil des pages, ce sont les nôtres, dans leur rudesse, dans leur évidente simplicité et leur justesse, dans leur quotidien et leur causticité. C’est un regard porté sur un père. Un regard sans concession, franc, direct. Une histoire de famille. Liminaire.


































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Ce bleu. 
Seulement ce bleu. 

Ce bleu-là. 
Qu’on porte en soi.

aux bords des mondes

ici
































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dimanche, février 28, 2016

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Pat Brassington
Individual photograph from
Cumulus Analysis
1986-87
18 silver gelatin photographs































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Mathilde

dans le silence compact

des sapins























les écorces boivent

notre corps qui êtes aux cieux

que votre neige arrive...



elle se branche sur le grand-hiver

elle écoute dans son propre espace



Chappaz

salutation du vide




L.A.Photographies Arêches février 2016































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Au 
commencement











était 
le pas glissé

respiration

flexion

désir

neige vent lumière


les randonneurs à ski

partent 
pour la banquise immergée
en plein ciel







L.A.Photographies Arêches février 2016
































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27.02.2016

14 : 00

Grand-Mont












blancheur

voilà le sens

oui

mais blancheur écrite

comme l'écorce du bouleau







L.A.Photographies Arêches février 2016




























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samedi, février 27, 2016

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WATCH AS THE FROZEN 

SURFACE OF LAKE SUPERIOR 

CRASHES ENDLESSLY INTO MOUNTAINS 

OF GLASSLIKE SHARDS 


ici
































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vendredi, février 26, 2016

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Louise Bourgeois

Les Étoiles

2009























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jeudi, février 25, 2016

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Richard Long

camp site stones 

Sierra Nevada 

Spain 

1985
































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poésie



















peut-être conduit-elle

à la présence totale

en communion avec




le désert

l'amibe

le vent  la poussière







Photographie Filip Roth 




























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On this

windy lonely day

Let's eat spicy noodles together

































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grid 

covering

raster graphics












L.A.Photographies février 2016





























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Lorsque Denis Roche - réduisant le poème au "spectacle de l'écriture" ou de "ce qu'ils nomment poésie" et, singulièrement, le vers au "spectacle de la versification" - décide, sans autre raison apparente [...] d'aller à la ligne, il est clair que la majuscule initiale, combinée au retour obstiné à la marge de gauche, n'a d'autre fonction que de signifier une forme : le vers, et à travers elle, un genre : la poésie.   J-P Bobillot, trois essais sur la poésie littérale, Romainville, Al Dante 2003.



































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basket






















black wooden box








red lacquered bentwood box






c'est toujours choisir

la personnalité du choix

























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Jonathan Smith

glaciers

ici
































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mercredi, février 24, 2016

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Ce qui enveloppe












ou sert à envelopper













qui couvre en entourant

L'enveloppe est non constitutive de l'objet

Pochette en papier
rectangulaire ou carrée
contenant ou destinée à contenir une lettre

une carte 
ou un objet plat et léger

qui porte le nom
ou le plus souvent l'adresse 
du destinataire

Enveloppe 
doublée fermée   timbrée




*



je pris une enveloppe et rédigeai l'adresse. Au moment où je me préparais à reprendre ma lettre, l'obscurité se fit, je ne pus que griffonner à l'aveuglette le mot « amitiés » et signer. Je tins à fermer l'enveloppe avant de me coucher; ... Abellio, Heureux les pacifiques,1946, p. 178























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Peter Fend 

DROUGHT

2015






























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le martèlement

de la pluie sur les carreaux














les bruissements 

de feuillage

d'un arbre proche



























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Se rendre 
compte tout à coup 


















que les expressions
prendre la porte et sortir de ses gonds 

sont liées 
par une même violence

celle de ce qui 
nous pousse hors cadre




Ce que 
la porte cache

ce qu’
elle dissimule

il arrive 
parfois qu’elle nous 

le révèle 
dans le même temps

même si ce temps 
est parfois très long à nous être 

révélé






Ce dialogue dans Matrix entre Morpheus (dont le nom tu le sais bien renvoie au dieu des rêves) et Neo : « Tu es dans la Matrice. Tu voudrais savoir ce qu’elle est, alors je peux t’indiquer la porte, mais toi et toi seul pourras décider de la franchir. Alors, que décides-tu ? Prends la pilule bleue et tout s’arrête après tu pourras faire de beaux rêves et penser ce que tu veux, choisis la pilule rouge et tu restes au pays des merveilles et on descend avec le lapin blanc au fond du gouffre. Mais n’oublie pas, je ne t’offre que la vérité, rien de plus. » 




une page qui se tourne

Liminaire






























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Elle

a wandering soul

















Le chemin de l'âme

est plus compliqué et plus inattendu



Il comporte des errances

des reculs



labyrinthes

et parties inversées






























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mardi, février 23, 2016

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Petite 
phénoménologie du portrait















Amusons-nous à imaginer une petite phénoménologie du portrait. Que regarder dans le portrait photographique ? Au centre d'un triangle dont les trois pointes seraient formées par le modèle, le photographe et le spectateur, le portrait fait varier les points de vue. D'abord, le point de vue du modèle : qui est donc celui dont on tire le portrait (étymologiquement "portrait" est composé de l'intensif "pour" et de "tirer" - mais que tire-t-on du modèle ?) ? Puis, le point du vue du photographe : a-t-il prévenu son modèle ou bien l'a-t-il surpris ? Qu'ajoute-t-il au réel qui signe sa manière ? Enfin, le point de vue du spectateur : d'où lui vient cet amour du portrait ?


De ces trois perspectives, celle du "modèle" paraît s'imposer avec le plus d'évidence. Car, à l'origine, c'est l'amour du modèle, la fidélité quasi amoureuse - comme le suggère Pline dans l'histoire légendaire des origines du portrait - qui inspire ce désir. Aussi est-ce sur ce terrain que se développe la première production : des images pour s'identifier, se reconnaître, mais aussi pour identifier et reconnaître.

Portraits / Visages































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Fenêtres d’appartement, 
















d’hôtel, de restaurant, de gare, d’ordinateur ou de téléviseur (cette autre fenêtre "qui contient toutes les fenêtres"), pare-brise, fenêtre de son lieu de travail, de la maison le matin quand on ouvre les volets, vitre du métro, du train, quand on regarde filer à vive allure le paysage distrait, autant d’images qui viennent du dehors, qui nous impressionnent. Les fenêtres cadrent un état du monde. Restituer par le biais de phrases concises, impressions détachées, fragment autobiographique, réflexion esthétique ou philosophique, sur des lieux dont le trait commun est leur banalité, le regard que l’on porte sur le monde. 







Les lieux de résidence


Pourquoi les lieux sans qualité viennent-ils toujours à bout des réticences de ceux qui les occupent ? Pourquoi les résidents refusent-ils souvent de reconnaître leur laideur quand les passants occasionnels n'ont aucune peine à l'admettre ? C'est qu'à la longue, les lieux de résidence et leurs environs (quels qu'ils soient) finissent toujours par impressionner la conscience de l'habitant, par devenir comme un autre soi-même, des sortes de corps extérieurs dans lesquels on s'est réalisé jour après jour, où l'on a joué son existence (raison pour laquelle on retrouve souvent avec émotion les anciens lieux de ses souffrances ou de ses bonheurs)... Il y a aussi que nous ne nous installons jamais innocemment quelque part. Les lieux nous habitent autant que nous les habitons, nous les supportons comme les corps qui envahissent les trottoirs à heures fixes, les couleurs, la pluie qui tombe, les mouvements, les pollutions, les objets environnants, les chats, les chiens... Et notre vue se laisse plus facilement corrompre qu'elle est porteuse, sans que nous en ayons forcément conscience, d'une masse d'informations anciennes, de sensations fugitives, de bonheurs éphémères, de souvenirs... Chaque regard porté sur le paysage intègre les traces de l'existence passée. Nous voyons bien plus que ce que le présent du réel nous donne. Et le poids de cette réalité invisible pèse sur notre conscience comme le désert pèse sur le regard du bédouin, la neige sur celui de l'Esquimau...



Raymond Bozier, Fenêtres sur le monde, Fayard, 2004, pages 116-117. Passage recopié(par Anne Savelli) dans la loge-bureau de la Bellevilloise, devant la fenêtre embuée où l'on distingue l'église Notre-Dame de la Croix et, derrière une antenne de télévision, presque aussi mince, la tour Eiffel


openspace




















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