samedi, mars 27, 2010

Alfred Stieglitz
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Je vous donne la photo comme l'équivalent
de ce que j'ai vu et senti ( Stieglitz 1900 )

orange et mandarine
pomme
poire
énoncés à la lettre, comme trois vers de haïkus
.




L.A. photographies, 2010

Haïku...

Il ressemble à rien et à tout
:
lisible, nous le croyons simple, proche, connu, savoureux, délicat, " poétique ", en un mot offert à tout un jeu de prédicats rassurants ; insignifiants néanmoins, il nous résiste, perd finalement les adjectifs qu'un moment plus tôt on lui décernait et entre dans cette suspension du sens, qui nous est la chose la plus étrange puisqu'elle rend impossible l'exercice le plus courant de notre parole, qui est le contraire. Que dire de ceci
:
Brise printanière
Le batelier mâche sa pipette
.
ou de ceci
:
Pleine lune
Et sur les nattes
L'ombre d'un pin
.
ou de ceci
:
Dans la maison du pêcheur,
L'odeur du poisson séché
Et la chaleur
.
Ou encore ( mais non pas enfin, car les exemples seraient innombrables ) de ceci
:
Le vent d'hiver souffle.
Les yeux des chats
Clignotent
.
Roland Barthes, l'empire des signes

Pourquoi le Japon ? Parce que c'est le pays de l'écriture : de tous les pays que l'auteur a pu connaître, le Japon est celui où il a rencontré le travail du signe le plus proche de ses convictions et de ses fantasmes, ou, si l'on préfère, le plus éloigné des dégoûts, des irritations et des refus que suscite en lui la sémiocratie occidentale. Le signe japonais est fort : admirablement réglé, agencé, affiché, jamais naturalisé ou rationalisé. Le signe japonais est vide : son signifié fuit, point de dieu, de vérité, de morale au fond de ces signifiants qui règnent sans contrepartie. Et surtout, la qualité supérieure de ce signe, la noblesse de son affirmation et la grâce érotique dont il se dessine sont apposées partout, sur les objets et sur les conduites les plus futiles, celles que nous renvoyons ordinairement dans l' insignifiance ou la vulgarité. Le lieu du signe ne sera donc pas cherché ici du côté de ses domaines institutionnels : il ne sera question ni d'art, ni de folklore, ni même de " civilisations " ( qu'on n'opposera pas le Japon féodal au Japon technique ). Il sera question de la ville, du magasin, du théâtre, de la politesse, des jardins, de la violence ; il sera question de quelques gestes, de quelques nourritures, de quelques poèmes ; il sera question des visages, des yeux et des pinceaux avec quoi tout cela s'écrit mais ne se peint pas
.
Roland Barthes
MU

le caractère MU, signifiant " rien ", " le vide ", tracé par une étudiante
( photo Nicolas Bouvier, Genève)
table des illustrations
L'empire des signes Roland Barthes
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Là-bas

La langue inconnue
Sans paroles
L'eau et le flocon
Baguettes
La nourriture décentrée
L'interstice
Pachinko
Centre ville, centre vide
Sans adresses
La gare
Les paquets
Les trois écritures
Animé/inanimé
Dedans/Dehors
Courbettes
L'effraction du sens
L'exemption du sens
L'incident
Tel
Papeterie
Le visage écrit
Des millions de corps
La paupière
L'écriture de la violence
Le cabinet des signes
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Table des matières
L'empire des signes
Roland Barthes