mercredi, février 25, 2009

Buis l'être végétal

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Buis 
l'être végétal


















Bien que l'être végétal veuille être défini plutôt par ses contours et par ses formes, j'honorerai d'abord en lui une vertu de sa substance : celle de pouvoir accomplir sa synthèse aux dépens seuls du milieu inorganique qui l'environne. Tout le monde autour de lui n'est qu'une mine où le précieux filon vert puise de quoi élaborer continûment son protoplasme, dans l'air par la fonction chlorophyllienne de ses feuilles, dans le sol par la faculté absorbante de ses racines qui assimilent les sels minéraux. D'où la qualité essentielle de cet être, libéré à la fois de tous soucis domiciliaires et alimentaires par la présence à son entour d'une ressource infinie d'aliments : L'immobilité.


Francis Ponge
le parti pris des choses
poésie/Gallimard

L.A. photographie, 
le buis, Villard S/Doron, Fév.2009



































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neige sur le pin

scène chinoise d'un arbre en hiver

pour aimer le frisson d'un vent


Nord-Est


je laisse le sombre et parle Tétra

genévrier

sous la neige
contre le tronc blanc

couronne lumineuse des Alpes tout autour

et aussi sur son éclat
à perte de vue cette incitation

la parole se trouve ici
le sens se déploie là-bas

ici & là-bas

parole et image ici le sens là-bas
°
L.A. photographie, la montagne d'Outray, Fév.2009


Le choix du français était pour Beckett un choix heureux, la possibilité d'atteindre, dans une autre langue, une beauté littéraire originale. Je ne pense pas qu'il y est contradiction entre la perte de la langue, avec le risque que cela fait courir au moi, et cette jubilation dans les mots, puisqu'il s'agit d'une sorte de résurrection du langage qui exige une mort prélable. 

C'est bien dans une langue étrangère, autre, qu'il s'est obligé à écrire, d'où cette apostrophe irrésistible de l'Innommable : " Chère incompréhension, c'est à toi que je devrai d'être moi, à la fin ". Tout résonne ici. La fin est celle de la quête mais aussi celle du monde, non pas l'apocalypse dans le temps mais le moment hors du temps où le vieux moi et son vieux monde seraient enfin réduit à néant. L'incompréhension fait surgir toute la tradition du savoir négatif, du " nuage de l'inconnaissance ", de la nuit obscure de l'âme, pour la saisir dans la perspective de la langue.



Michael Edwards
Beckett ou le don des langues
éd.espaces 34
































neige, glace et pin.

L.A. photographie, les Saisies,Fév.2009

Ce fond sans fond

Martin Ziegler, une poésie peut-être abyssale et toujours plus abyssale...
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cela qui n'a pas bougé
avec le souffle
ne saurait être
atteint

d'ailleurs

qu'en pensées

impensable
intouchable
.
sans séparer du chiffre
le recouvrement

mais du tout
un signe
l'hiver

blanc
même la

grive
(Démocrite)

son
pur
silence
°
Martin Ziegler
comme il en irait du venir en souffrance
éd.L.Mauguin
°
" abyssal et encore abyssal ", " abyssal et toujours plus abyssal " ouvert au-delà de lui en dépassement... "grand","subtil","distant",...

La dénomination détermine un objet tandis que l'indication suit ce qu'on veut dire ; la dénomination naît de l'objet et l'indication provient du sujet... La détermination naît d'une caractérisation objective, l'indication provient d'une approche subjective. La dénomination ne naît pas du vide et l'indication n'en provient pas non plus. Aussi la dénomination rate-t-elle grandement le sens visé et l'indication n'arrive-t-elle pas à dire jusqu'au bout. C'est pourquoi, indiquant l'abyssal, on dit " abyssal et encore abyssal ".
°
Avec le Laozi Zhilüe
source F.Jullien, la grande image n'a pas de forme
ou comment indiquer l'ineffable (XII)
la pensée chinoise dans le miroir de la philosophie