mercredi, février 25, 2009



Le choix du français était pour Beckett un choix heureux, la possibilité d'atteindre, dans une autre langue, une beauté littéraire originale. Je ne pense pas qu'il y est contradiction entre la perte de la langue, avec le risque que cela fait courir au moi, et cette jubilation dans les mots, puisqu'il s'agit d'une sorte de résurrection du langage qui exige une mort prélable. 

C'est bien dans une langue étrangère, autre, qu'il s'est obligé à écrire, d'où cette apostrophe irrésistible de l'Innommable : " Chère incompréhension, c'est à toi que je devrai d'être moi, à la fin ". Tout résonne ici. La fin est celle de la quête mais aussi celle du monde, non pas l'apocalypse dans le temps mais le moment hors du temps où le vieux moi et son vieux monde seraient enfin réduit à néant. L'incompréhension fait surgir toute la tradition du savoir négatif, du " nuage de l'inconnaissance ", de la nuit obscure de l'âme, pour la saisir dans la perspective de la langue.



Michael Edwards
Beckett ou le don des langues
éd.espaces 34
































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