dimanche, décembre 21, 2025


le loup est consolé par le hurlement le mouton par la laine la forêt  par la fauvette

le philosophe par l'épiphonème 

courte exclamation sentencieuse de portée générale par laquelle on termine le plus souvent 
un récit un discours une fable.


5 621

le monde et la vie ne font qu’un

Tout ce qui existe respire ensemble


la matière
le souffle
le mouvement

s’entrelacent sans séparation











Ellsworth Kelly
Sketchbook #17 November 1951–May 1952












il n’y a pas 
de dehors 
ni de dedans 

seule une continuité vivante où chaque instant reflète le tout













563

je suis mon monde 

Microcosme
univers en miniature
reflet du grand
chaque élément y contient la totalité
chaque mouvement reproduit le rythme du cosmos
le petit monde révèle le grand
et le regard scrutant y trouve 
l’infini







5 631

il n'y a pas de sujet de la pensée de la représentation



rien ne tient fermement le regard


la conscience se dissout dans ce qu’elle observe


l’image se crée sans maître


Pensée et monde s’entrelacent


aucune instance ne peut se réclamer du contrôle





rien
il marchait vers ce rien

l'immense abandon 
des hommes était autour de lui















le temps

out

l’espace 

out


reste un battement nu

plus de mesure 

plus d’étendue

seulement 

l’instant sans bord

où l’être tient

hors durée 

hors lieu












Rashid Johnson 
Untitled Red Drawing 2020




un écho qui ne peut se taire
résonance sans paroi ni source


ce qui persiste après la voix
mémoire vibrante du passage

il insiste dans le silence même
comme une vérité qui refuse la clôture




poésie sur papier marouflé   mots collés à la matière


la phrase épouse la fibre
résiste au pli à l’arrachement


le sens devient surface et le temps s’y fixe
comme une peau offerte au regard





















Adèle Yon  Mon vrai nom est Elizabeth


Une chercheuse craignant de devenir folle mène une enquête pour tenter de rompre le silence qui entoure la maladie de son arrière-grand-mère Elisabeth, dite Betsy, diagnostiquée schizophrène dans les années 1950. 












La narratrice ne dispose, sur cette femme morte avant sa naissance, que de quelques légendes familiales dont les récits fluctuent. 

Une vieille dame coquette qui aimait nager, bonnet de bain en caoutchouc et saut façon grenouille, dans la piscine de la propriété de vacances. 

Une grand-mère avec une cavité de chaque côté du front qui accusait son petit-fils de la regarder nue à travers les murs. 

Une maison qui prend feu. 

Des grossesses non désirées. 

C’est à peu près tout. 

Les enfants d’Elisabeth ne parlent jamais de leur mère entre eux et ils n’en parlent pas à leurs enfants qui n’en parlent pas à leurs petits-enfants. “C’était un nom qu’on ne prononçait pas. Maman, c’était un non-sujet. Tu peux enregistrer ça. Maman, c’était un non-sujet.”



Mon vrai nom est Elisabeth est un premier livre poignant à la lisière de différents genres : l’enquête familiale, le récit de soi, le road-trip, l’essai. À travers la voix de la narratrice, les archives et les entretiens, se déploient différentes histoires, celles du poids de l’hérédité, des violences faites aux femmes, de la psychiatrie du XXe siècle, d’une famille nombreuse et bourgeoise renfermant son lot de secrets.





***

mémoire folie silence familial condition féminine 

psychiatrie identité

ce livre est un récit hybride 
entre autobiographie enquête et réflexion historique

Adèle Yon y explore l’histoire d’une femme de sa famille, longtemps réduite au silence et interroge la manière dont certaines femmes ont été qualifiées de folles parce qu’elles ne correspondaient pas aux normes sociales de leur époque



Le point de départ du récit est une figure familiale mystérieuse une femme surnommée  Betsy  dont on ne parle presque jamais

L’autrice découvre peu à peu que cette femme s’appelait en réalité Elizabeth et qu’elle a été internée dans un hôpital psychiatrique au milieu du XXᵉ siècle


À travers des archives médicales des documents familiaux des témoignages et sa propre réflexion Adèle Yon mène une enquête pour comprendre ce qui est arrivé à Elizabeth

elle met au jour une histoire marquée par 

le poids du mariage

la maternité imposée

la violence symbolique et médicale

et une psychiatrie souvent utilisée comme outil de contrôle social


Le roman montre comment Elizabeth a été progressivement dépossédée de sa voix de son identité et même de son nom jusqu’à devenir une figure effacée de l’histoire familiale

En racontant cette histoire l’autrice cherche à réhabiliter Elizabeth à lui rendre son nom, sa complexité et sa dignité tout en questionnant les mécanismes de domination et de silence qui traversent les générations

le livre dénonce la manière dont la société a pathologisé certaines femmes jugées trop libres trop sensibles ou trop rebelles

il interroge la transmission du silence et des traumatismes familiaux

il pose la question essentielle de l’identité : qui décide de ce que nous sommes, et qui a le droit de raconter notre histoire


Mon vrai nom est Elizabeth est un récit puissant et intime qui mêle enquête familiale et réflexion féministe et qui redonne une voix à une femme effacée par l’histoire en montrant que retrouver un nom c’est aussi retrouver une existence



***


panorama des liens 
entre Mon vrai nom est Elizabeth et d’autres œuvres majeures portant sur 
la mémoire et la folie


Mémoire familiale et silence

La Place – Annie Ernaux


même démarche 
d’enquête intime à partir de fragments et de souvenirs

Refus du romanesque 
au profit d’une écriture sobre et presque documentaire


comme Ernaux 
Adèle Yon écrit contre l’oubli et contre 
le silence transmis de génération en génération



L’Usage de la photo – Annie Ernaux & Marc Marie

les objets et les traces 
deviennent des supports de mémoire

la photo comme fragment du réel
comparable aux archives médicales chez Yon

la mémoire est lacunaire reconstruite à partir de restes



Folie féminine et enfermement

La Femme rompue – Simone de Beauvoir


femme écrasée par les normes conjugales

glissement progressif vers une souffrance psychique

la folie n’est pas innée mais produite par un système social oppressif


Histoire de la folie à l’âge classique – Michel Foucault

Lien fondamental 

analyse historique de l’enfermement des  fous 

la psychiatrie comme instrument de normalisation sociale.

Mon vrai nom est Elizabeth illustre concrètement ce que Foucault théorise



Le Papier peint jaune – Charlotte Perkins Gilman

femme enfermée pour hystérie

narration de la descente dans la folie imposée

même critique des traitements psychiatriques faits aux femmes



Mémoire traumatique et reconstruction

W ou le souvenir d’enfance – Georges Perec


reconstruction fragmentaire de la mémoire.

impossibilité de dire directement le trauma.

chez Yon comme chez Perec l’écriture contourne le vide laissé par le silence


Dora Bruder – Patrick Modiano

enquête sur une personne disparue.

recherche d’une identité effacée par l’histoire.

Elizabeth comme Dora est une figure absente qu’il faut reconstituer




Folie et identité féminine

Une chambre à soi – Virginia Woolf


réflexion sur les femmes rendues folles par manque de liberté

Woolf évoque des femmes enfermées pour leur indépendance

Elizabeth incarne cette femme empêchée de vivre pleinement


Mon vrai nom est Elizabeth 

s’inscrit dans une littérature de réparation 

réparer une mémoire effacée

rendre justice à une voix confisquée

montrer que la folie est souvent une construction sociale

le roman dialogue avec de grandes œuvres qui interrogent 

qui a le droit de parler

de se souvenir et d’exister























les granites se souviennent le sol est siliceux de mémoire 
tandis que le cielnébuleux laisse passer des météores


Solstice   le temps se retourne

le solstice est ce point secret où l’excès touche sa limite


21 décembre 2025

Solstice 

moment de l’année où le Soleil atteint sa plus grande ou sa plus petite hauteur apparente dans le ciel marquant le jour le plus long ou le plus court

il enseigne que le changement ne se reconnaît pas à la vitesse mais à 
l’inflexion silencieuse

































Solstice 


l’instant où le temps atteint sa limite
et consent à changer de direction



cosmique est le seuil quand la lumière se fait stellair et que le temps 
devient sidéréen





entre galaxies et profondeur abyssale
le solstice tient 


ni sommet ni chute mais l’instant exact
où la matière et l’astre
se reconnaissent



sous nos pas
la nuit est telluric
minérale

basaltée 
de silence et de feu ancien





12 mots de huit lettres

cosmique

stellair

sidéréen

telluric

minérale

basaltée

granites

siliceux

nébuleux

météores

galaxies

abyssale



S O L S T I C E

le jour s’y arrête un instant 

la nuit 
s’y recueille

comme si 

le monde respirait
avant de repartir autrement