La double négation en politique contemporaine

Dans le débat politique actuel 

de nombreux mouvements se définissent avant tout 

par ce qu’ils ne sont pas 

anti-système

anti-élite

anti-mondialisation

anti-woke

anti-autoritaire

cette posture constitue une première négation  

le rejet d’un ordre jugé 

dominant

mais

lorsque ces mouvements accèdent au pouvoir ou à l’influence

ils sont souvent conduits à nier 

leur propre négation

ils doivent gouverner 

instituer des règles produire des structures

or ce faisant ils réintroduisent 

fréquemment les mécanismes qu’ils dénonçaient 

centralisation

contrôle

communication stratégique

élites de remplacement

C’est la négation de la négation

Cette double négation ne rétablit pas l’état initial mais en révèle la logique profonde  le système rejeté n’était pas seulement extérieur il était déjà le cadre implicite de la contestation 

L’anti-système 

en se retournant contre lui-même devient souvent 

un système alternatif mais structurellement similaire

on observe ainsi que 

refuser l’autorité 

peut conduire à une autorité plus dure

refuser l’idéologie 

peut produire une idéologie plus rigide

refuser la domination 

peut engendrer une domination inversée

La double négation 

montre alors une limite politique majeure 

s’opposer ne suffit pas à transformer

Sans invention de nouvelles formes institutionnelles 

sans déplacement réel du fondement 

rapport au pouvoir au langage 

à la vérité 

la négation 

de la négation ne libère pas 

elle reconduit autrement ce qui était combattu

La question 

politique décisive devient 

alors 

comment sortir 

de la logique de l’anti- 

pour entrer dans une politique de l’affirmation

capable de créer du commun sans reproduire ce qu’elle nie 

*

Moments historiques précis

La Révolution française 1789-1799

Première négation  

renversement de l’Ancien Régime anti-monarchie

Négation de la négation 

mise en place de nouvelles institutions 

mais parfois centralisées et autoritaires la Terreur le Directoire

reproduisant certaines dynamiques 

de pouvoir qu’ils dénonçaient

La révolution russe 1917

Première négation  

chute du tsarisme anti-autocratie

Négation de la négation 

le régime bolchevique institue une nouvelle hiérarchie

un État fort et centralisé, qui emprunte 

aux structures qu’il avait rejetées

Mouvements 

post-coloniaux en Afrique et en Asie 

XXᵉ siècle

Première négation 

rejet des puissances coloniales anti-impérialisme

Négation de la négation 

certaines structures étatiques 

héritées de l’administration coloniale 

sont conservées ou adaptées

révélant que la contestation ne supprime pas toujours 

le cadre fondamental

dans chacun de ces cas la double négation 

montre que la transformation réelle nécessite 

plus qu’un simple rejet 

il faut une reconstruction 

consciente des fondements

la double négation 

révèle 

un principe fondamental 

la simple opposition 

ne produit pas nécessairement 

de liberté 

ni 

de nouveauté

Nier quelque chose 

c’est déjà en être dépendant 

Nier la négation

ne revient pas à restaurer l’état initial 

cela le transforme 

souvent partiellement ou de façon paradoxale

philosophiquement 

cela nous enseigne 

que la véritable transformation exige 

une réinvention du fondement lui-même

Chez Hegel

c’est le dépassement dialectique

Chez Nietzsche

c’est l’affirmation créatrice

Chez Spinoza

c’est la connaissance et la puissance d’agir accrue

Ainsi toute critique 

toute révolution 

toute opposition ne peut être efficace 

que si elle repense les conditions mêmes 

de ce qu’elle combat plutôt que de s’y opposer uniquement