mardi, décembre 09, 2025


André du Bouchet

non pas un poète du monde
mais un voyageur du temps arrêté
allant dans l’épaisseur des instants
comme on franchit un ciel trop proche




















Il marche dans les siècles sans les parcourir 

il les fend

comme on fend l’air avec le front

à travers un blanc qui brûle



Son pas ne mesure pas la distance  il mesure la déchirure

par laquelle le réel se laisse entrevoir

à même la pierre

le vent

la page encore froide



Du Bouchet avance dans un temps qui ne déroule rien

mais se ramasse autour de lui

en éclats de lumière

en blocs d’air

en secondes compactes

où tout pèse soudain plus lourd


Voyageur d’un temps sans ligne il n’habite pas l’avant ou l’après 

il habite cette arête 

ce point vif

où le monde apparaît

comme s’il venait d’être créé

où la langue n’a pas encore trouvé

sa propre respiration


Il recueille ce qui va trop vite pour être vu

et ce qui demeure trop lent

pour être pensé



Le poème devient alors le passage où ces vitesses contraires

se rencontrent sans se rejoindre

Du Bouchet marche dans un présent

qui n’existe que par fragments

et chaque fragment

est un monde entier

poussière d’absolu

paupière de lumière

pierre qui garde le souffle



Portrait du poète  un homme debout dans le vent

qui laisse le temps glisser

entre ses doigts ouverts

pour n’en garder qu’un éclat 

assez pour tenir

assez pour brûler


*


poète

SCRIBE DE L’ÉCLAIRCIE 

constructeur d’yeux dans la lumière

il écrit non pas pour raconter mais pour ouvrir

il taille dans le réel des fenêtres instantanées

on lit ses phrases comme on marche dans un rayon de soleil

c’est un architecte du clair



























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