vendredi, mai 09, 2025

ainsi disais-je

et 

je pleurais dans l’extrême amertume 
de mon cœur 
broyé 


et voici que j’entends une voix venue de la maison voisine celle d’un garçon ou d’une fille je ne sais qui sur un air de chanson disait et répétait à plusieurs reprises 


prends lis  

prends lis 


et aussitôt 
















changeant de visage je me mis à réfléchir intensément en me demandant si dans un jeu une telle ritournelle était habituellement en usage chez les enfants 

mais il ne me revenait pas de l’avoir entendue quelque part 

et refoulant l’assaut de mes larmes je me levai ne voyant d’autre interprétation à cet ordre divin que l’injonction d’ouvrir le livre et de lire le premier chapitre sur lequel je tomberais 

je venais en effet d’apprendre qu’Antoine avait tiré de la lecture de l’Évangile pendant laquelle il était survenu par hasard un avertissement personnel comme si c’était pour lui qu’était dit ce qu’on lisait 

va 
vends 
tout ce que tu possèdes 
donne-le aux pauvres et tu auras 
un trésor 
dans les cieux
 
viens
suis-moi 

et qu’un tel oracle l’avait aussitôt converti à toi 

je me hâtai donc de revenir à l’endroit où Alypius était assis  car c’est là que j’avais posé le livre de l’Apôtre quand je m’étais levé

je le saisis 
je l’ouvris et 
je lus en silence 
le premier chapitre 
sur lequel tombèrent mes yeux

  
point de ripailles ni de beuveries 
point de coucheries ni de débauches 
point de querelles ni de jalousies. 

mais revêtez-vous du Seigneur Jésus-Christ 
et ne vous faites pas les pourvoyeurs de la chair 
dans ses convoitises

je ne voulus pas en lire davantage 

je n’en avais plus besoin 

ce verset à peine achevé à l’instant même se répandit dans mon cœur une lumière apaisante et toutes les ténèbres du doute se dissipèrent  

Les Confessions livre VIII chapitre 12


















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