mardi, novembre 14, 2023


tout ce que l’on observe 
tous les systèmes physiques biologiques ou issus de l’imagination humaine 
n’importe quel phénomène ou événement résultent
d’un antagonisme d’énergies 


on peut tout savoir de la tulipe 

exhaustivement

écrit 

Jacques Derrida 


sauf 
pour quoi 
elle est belle


















le sol se dérobe sous mes pieds 

chapelles noircies par le temps et croix sculptées 

catafalques et pierres tombales 

grises 


succession 

de chemins qui s’ensauvagent à travers bois


un florilège

de bouleversements


le retour

d'

une nuit blanche courant dans les veines

une

tendresse sans mesure



je commencerai par 

être

au milieu de la poussière


*



la production poétique dépend de deux sources d’inspiration 


une force homogénéisante centripète en relation avec les notions d’uniformité de conservation de permanence de répétition de nivellement de monotonie d’égalité de rationalité etc.  et à l’opposé 

une force hétérogénéisante centrifuge en relation avec les notions de diversité de différenciation de changement de dissemblance d’inégalité de variation d’irrationalité etc


il est évident que ce point d’équilibre des deux sources d’inspiration exerce une attraction sur tous les  poètes

leurs œuvres prennent en compte les deux pôles antagonistes dans des proportions différentes mais tournent toutes autour de ce  foyer  de mise en tension



toute création 
contient nécessairement à la fois 
des éléments littéraires et 
contre-littéraires 




je parviens 
au parfait équilibre acoustique 


pourquoi me déplacer 

d' 
une certaine hauteur 
de rêve 

je vois tout







encore sombrer  

descendre  


tomber

baisser

sortir

s'abaisser

déchoir


ou aspiré au loin

ou fatigue  

désespoir






























la seule chose 
recommencer encore 
si possible 
 
encore une fois des mots 
l’équivalent d’une mort – ou le contraire même – ou peut-être rien
























être ici  

le calme 

épuisant de tension 

le monde autour qui ne s’arrête pas  

mais pourrait s’arrêter  

le souffle qui pourrait s’arrêter maintenant  

un instant après l’autre  

même égalité plane 

même  dureté froide  

même goût fade et doux  

supporter encore d’aller vers d’autres moments pareils  

continuer seulement le souffle  

la respiration 

prolonger le regard  

simplement





sans doute – une certaine confusion –auparavant – chaque événement détruit par lui-même – passant d’une chose à l’autre – revenant en arrière – avançant – imprévisible – dans un avenir imaginé  – s’accrochant autour de lui à toutes les rugosités – à tous les angles



jusqu’à la limite 

l’immobilité

paralysie

stagnation

inertie

repos

inactivité

inaction

fixité



sursaut


cassure



fissure

faille

fente

fracture

fêlure

rupture

coupure

brèche

brisure

lézarde

dislocation

crevasse

blessure

fossé

déchirement

débris

distinction

disjonction

diaclase

casse

brouille



*




attitude autre altitude

l’ennui léger à la fenêtre enduré dès l’enfance à regarder passer dans le ciel quelque chose attendre un événement venu des nues  

un nuage effilé par le vent le passage de l’avion disparu par l’embrasure des arbres un V d’oiseaux très haut en solitude rebroussant leur chemin en lançant des signaux aux autres animaux restés au sol cet ennui lentement scruté derrière la vite avait changé progressivement de sens glissé par la force des ans 

nouveaux cirrus autre altitude 

parmi les nuages qui commençaient à s’amonceler 
non plus singuliers 
mais pluriels  

les ennuis 


et de loin 
le rire clair qui 
tout balaie au ciel de novembre 
à nouveau en mouvement













Corps là

noué

noué aux mots

























l’étranglement du souffle

perte du sol

pendu


balancement à l’intérieur des mots 

troué

vide













approche de la folie

peur continuelle de la fuite verticale

les mots en spirale fuyante 

aspirée
















 sans prise

sans arrêt

tremblement


un cri





peur continuelle

absence de mots 

gouffre

ouvert  descente  descente

mains accrochées au visage

toucher

corps là

résistance 

entendre encore le souffle 

quelque part

à l’instant savoir  

souffle là

à l’écoute du bruit

affolement

tendu pour entendre

tendu pour résister


















chaque corps est 

un lieu 

de recueillement 


une allumette craquée dans le noir


une trace 

une empreinte préservée du passage du temps

 

tentative fragile 

de fixer 

une preuve dans l’épreuve
















 


la cartographie secrète 

des espaces

de ce qui reste après la perte 


les contours de la disparition


les chaises vides 




la beauté est trop violente 

comme la douleur


je ne la regarde pas


ou si 

je la regarde 

j'oublie ce que je vois

 

je garde seulement les ombres et la lumière avec ce qui fuit et que 

je ne reconnais plus


je garde le vent qui m'enveloppe mais que 

je ne vois pas


je ne sens que ce frôlement et ce léger désespoir 

qui me guette toujours



le présent est une perpétuelle catastrophe 

une lettre tracée sur le bleu puis effacée  

un trait 





un lieu

une allumette une trace une empreinte

une preuve une lettre

un trait