lundi, octobre 02, 2023


dans toute hiérarchie 

il y a 

quelque chose que l’on pose comme terme le plus haut

et autre chose qu’on pose comme 

terme le plus bas


























de ce fait 

la première 

des lois 

d’une hiérarchie est simplement 


toute hiérarchie se 

déploie entre un fond et un sommet 



comme nous recherchons la hiérarchie 

des valeurs

nous pouvons appeler valeur suprême 

le terme le plus haut 

de celle-ci

et valeur 

dernière son terme le plus bas



seconde loi 


la place 

de tous les termes 

de la hiérarchie 

dérive 

de son terme le plus haut 



plus 

une chose a 

d’affinités avec la valeur suprême 

plus elle est aimée


donc placée haut 

dans la hiérarchie, plus elle en est éloignée, 

moins elle l’est



ainsi ceux qui placent le plaisir

par exemple, 

au sommet

de leur hiérarchie 

des valeurs

aiment les autres choses














troublé 


comme

quelqu’un qui a vu 

de ses propres yeux une fleur boire l’eau 

d’un verre en quelque secondes 

il se leva et quitta 

la femme pour prendre 

le bateau et retourner sur son île


là il 

dit à son perroquet   J’ai fait un 

détour  





















ses 
désirs ou ses appréhensions par exemple se 
dissimulent en un rien 
de temps 
dans les objets et les animent

Anna & moi vies parallèles 


il se passe à présent quelque chose 

d’inattendu 

 

des phrases qui affluent se soulèvent 

des mots qui 

deux par deux s’élancent vers le ciel où ils s’immobilisent sous formes 

de lettres 

de feu



*



suppose que la peur que provoque toute 

découverte 

du monde 

soit si grande 

qu’elle rende l’écriture presque impossible 


chaque poème est un nouveau 

départ à partir 

d’un lieu à peine 

différent




dans la lignée des  Cantos  de Pound de  de Zukofsky de Paterson  de Williams des  Passages  de Duncan ou du  Maximus  de Olson  Les Tablettes  tente par une géniale fiction moderniste faite de fragments d’exprimer et la totalité et le fait qu’elle échappe toujours

















seuls 

deux penseurs 

se confrontèrent à la matière



Diogène chaque nuit contre le bois 

dur de son tonneau


et


Empédocle 

qui ne nous en laissa qu’

une sandale
























les élèves de l'Académie faisaient parfois l'école buissonnière

pour aller conter fleurette

au Jardin 

d’Épicure




































François Matton est né à Paris en mars 1969

enfance heureuse et insouciante perturbée par 

de violentes crises 

d’asthme























Bon élève dès la maternelle bien qu’un peu effacé il le restera jusqu’à la fin de ses études aux Beaux-Arts de Reims et de Nantes

Vivant de peu se contentant d’un rien, son existence frappe par son absence totale de faits remarquables  aucun voyage à l’étranger aucune aventure amoureuse aucune rencontre fondatrice aucune ambition sociale nulle tentative de sortir de l’ordinaire

Il passe beaucoup de temps dans les bibliothèques municipales à feuilleter tout ce qui lui tombe sous les yeux  de vieux romans jaunis des guides de voyage aux quatre coins du monde des récits d’aventures exaltés des bandes dessinées écornées des ouvrages mystiques des livres de recettes

Mis à part de fréquentes promenades non loin de chez lui son unique plaisir consiste à rester seul dans son appartement à ne rien faire

Il a d’ailleurs pour cela une disposition qui, pour le coup semble exceptionnelle 

C’est un peu comme si ne rien faire coïncidait chez lui avec le plus grand sentiment d’être

Être quoi  

Essentiellement rien   et c’est de cela qu’il tire sa joie

La conscience de n’être rien l’amène au cœur du monde

N’étant rien il prétend se faire espace d’accueil pour tout 

Et c’est précisément cette ouverture qui le pousse à dessiner ce qu’il appelle  les infinies manifestations du même 

Il voit dans sa pratique du dessin qu’il lie à l’écriture une façon de célébrer tout ce qu’il perçoit  le plus proche comme le plus lointain le plus trivial comme le plus noble le plus grave comme le plus léger 

Tout vient se placer sur sa feuille sans aucune hiérarchie

Tous les registres se mêlent indifféremment ce qui donne lieu à de curieuses rencontres

C’est là que commence et finit la seule curiosité d’une existence des plus effacées




































après avoir considéré le monde

le nihiliste laisse tomber cette terrible sentence 

rien n’a de valeur


ni le bonheur 

ni l’existence même de l’homme

et 

de même pour le reste   tout pourrait 

disparaître

sans regrets 


que lui répondre 



















est-il possible 

de lui montrer que quelque chose au moins

ait 

une quelconque valeur 


difficile 

car personne ne s’accorde 


pour l’un ce qui a une valeur 

c’est l’ordre

pour l’autre le désordre


l’un aime les voyages

l’autre préfère la lecture


certains crient  vive la patrie  

d’autres 

vive la liberté 


tel aime la nature 

dans laquelle il se promène 

tel autre la détruit


nul consensus

nulle évidence donc

dans le domaine des valeurs























le vieil océan

donne leçon 

de scepticisme rappelant au navire ballotté 

de toute part

qu’à tout argument s’oppose 

un argument égal























les pages 

d'un livre ouvert virevoltent au vent la brise 

donne le fin mot 

de l’histoire

au cosmos attentif et 

au criquet éberlué




















comment 


s'ouvrir à ce qui n'est pas 

dans l'urgence ordinaire 

des jours sans avoir le sentiment 

de perdre son temps 


comment 

























surmonter la peur 

de l'inutile 

du non-dispensable 

de la gratuité

de la dépense pour rien