des points 

d'expérience sont lâchés pour ne plus jamais être repris

les mots s'estompent

les événements s'évanouissent et 

le soi devient 

un océan parsemé d'îlots 

de rappel exact et 

d'autres îlots 

d'imprécision 

l'identité devient 

un archipel vaste et mystérieux 

entouré 

de brouillard avec 

des courants 

des marées inconnues 

des rivages indéchiffrables 

qui sont presque impossibles à cartographier ou à naviguer 

l'expérience n'est pas imprimée 

les composants 

de l'expérience humaine ordinaire ne s'enregistrent pas 

la vie sur terre passe à côté 

de vous

vous êtes invisible à vous-même 

c'est 

sûrement la définition 

d'

une malédiction

*

quand je repense à cet été maintenant c'est avec incrédulité j'étais à peine plus qu'un adolescent une époque où l'identité est un sujet d'intrigue de curiosité et de fascination constante un cadre d'existence auquel on commence seulement à se familiariser

le poète propose 

une poésie sémiotique

théorie générale des systèmes de signes 

qui au-delà du mot et 

de la lettre se construit à partir 

de signes 

de toutes natures

 

forcément multiple

il se situe à la fois 

dans 

une lignée post-concrète 

par son travail 

de multiplication 

des champs sémantiques en faisant se côtoyer 

dans un même espace

des signes  textuels visuels objectals 

d'horizons différents

et post-fluxus 

dans cette attitude d'

une poésie comportementale, 

où est expérimentée à chaque instant la poésie 

comme partie intégrante 

du vécu

mais avant tout

la poésie s'expérimente physiquement  

elle 

est 

d'évidence 

performative

*

sur 

des squelettes 

d’oiseaux nains s’en va l’enfance 

de ce jour en vêtement 

des îles et plus légère que l’enfance sur 

des os creux de mouette

décrire 

un certain processus neuronal 

n’est pas le vivre 

n’est pas vivre l’expérience 

qui va avec lui 

vous pouvez avoir n’importe quel processus du cerveau que 

vous voulez pourtant 

vous n’avez absolument aucun argument 

en principe pour penser qu’ils devraient être associés 

avec l’expérience vécue

c’est ainsi que 

corrélation observée 

ne signifie pas automatiquement causalité 

d’autant plus qu’il existe plusieurs types de causalités 

une causalité simple 

les événements dans le cerveau produisent 

la conscience 

ou 

une causalité inverse 

ce sont les événements conscients 

qui causent les événements 

du cerveau

ou encore 

une causalité bidirectionnelle

c’est à dire que le cerveau 

est la cause 

de la conscience et réciproquement  

autrement dit 

le cerveau et la conscience co-émergent 

en dépendance

le silence 

tombe goutte à goutte

il se forme 

sur le toit 

de l'âme et tombe 

sur le sol en grandes flaques

seulseulseulàjamais

j'entends 

le silence qui tombe et s'élargit en cercles

jusqu'aux suprêmes confins

ne pas 

considérer que la connaissance va 

chercher son objet 

déposer 

toute quête d’objet pour ne plus être que dans l’expérience pure

la présence 

les choses 

telles qu’elles apparaissent 

fabuleuse

la couronne rouge du mot

de pourpre

chaque larme retenue revient comme une vague

les gouttes 

de silence coulent sur mon visage

mon nez fond 

comme celui d'un bonhomme 

de neige 

debout 

dans la cour sous la pluie

elles tombent 

je me dissous

mes traits s'effacent

il devient difficile de me distinguer d'

un autre homme

peu importe

et qu'est-ce qui importe

fabuleux

cette justesse de sens et

ce don de savoir entendre

l’expérience n’est pas 

un objet

 

l’objet est 

une entité 

supposée exister par-delà les situations 

les états subjectifs et 

l’être-présent 

au contraire 

l’expérience consciente est située 

elle est 

ce que cela fait d’être 

en ce moment

comme si 

la mer s'était ouverte en 

une planète étrangère

il existe 

une relation mutuelle 

entre le cerveau et la conscience 

ensemble 

le cerveau la conscience et la relation qu’ils entretiennent 

appartiennent à 

l’expérience

cela forme 

une boucle étrange 

la recherche d’une approche neuroscientifique de la conscience n’ignore pas cette boucle étrange et ainsi elle offre la possibilité de faire une neuroscience qui lui soit applicable 

mais qui pour autant ne soit

ni 

réductionniste

ni 

matérialiste

un neurobiologiste-philosophe

n’essaie pas d’avoir 

une science objective de la subjectivité 

il veut avoir 

une science 

qui cultive à la fois le point 

de vue objectif et subjectif et les connecter

 

il ne veut pas saisir un dans l’autre

il veut relier les deux choses