lundi, février 20, 2023


son souffle s’est suspendu 

un moment 

où 

j’allais m’assoupir 


il a repris 

s’est suspendu à nouveau 





















de cet œil entrouvert

qui n’avait pas cillé depuis des heures 

j’ai cru voir partir 

une très fine flèche 

à peine 

un filin de lumière



que dois-je faire 




marche sous ces pins et regarde autour de toi 

vers les montagnes 

le soleil se couche


où es-tu 

où es-tu 



tout 

homme prend 

les limites 

de son champ 

de vision pour 

les limites 

du monde


le monde 

dans lequel chacun vit dépend 

de la façon 

de le concevoir

















encore 

un pas 

dans la guérison 

et 

l’esprit libre se rapproche de la vie 

lentement il est vrai 
presque 
à contre-cœur
presque avec défiance 

tout se fait 
de nouveau plus chaud autour de lui 

plus 
doré pour ainsi 
dire 

sentiment et sympathie 
acquièrent 

de la profondeur



























 
des brises tièdes 
de toute sorte passent au-dessus 
de lui 

il se trouve
presque comme 
si
 
ses yeux 
s’ouvraient pour la première fois 
aux choses prochaines 




























il est émerveillé
 
et
 
s’assied en silence  


où 

était-il donc 

ces choses prochaines et proches  
comme elles lui semblent 
changées  

quel duvet et quel charme 
elles ont cependant 
revêtus  



il jette en arrière 
un regard de reconnaissance 

pour ses voyages 
pour sa dureté et son aliénation de soi-même 
pour ses regards au loin 
et ses vols d’oiseau 
dans les hauteurs froides 

quel bonheur 
de n’être pas resté toujours  à la maison  
toujours chez lui comme 

un douillet 
un engourdi de casanier 

quel frisson inéprouvé 

quel bonheur encore dans la lassitude 
l’ancienne maladie

les rechutes du convalescent 

comme il se complaît 
à rester tranquillement assis avec son mal
à filer la patience
à se coucher au soleil 


qui 
comprend 
comme lui 
le bonheur 
qu’

il y a 

dans l’hiver 

dans 
les taches de soleil 
sur la muraille  


ils sont 
les animaux les plus reconnaissants du monde et les plus modestes 

ces convalescents 
ces lézards à demi revenus à la vie



il y a 

tels parmi eux 
qui ne laissent pas passer 
un jour 
sans lui appendre au bas de sa robe traînante 
un petit couplet louangeur


et 
pour parler sérieusement 
c’est 

une cure à fond contre tout pessimisme 

le cancer comme on sait des vieux idéalistes et héros du mensonge 
que de tomber malade à la façon de ces esprits libres 
de rester malade 
un bon bout de temps 
et puis
lentement 
bien lentement 
de revenir en bonne
j’entends 
en 

meilleure  santé 



il y a 

science 

science de vivre 

à ne s’administrer longtemps 

à soi-même 

la santé 

qu’à petites doses






























des variantes de 

bête intelligent 

sont aussi à côté de la plaque 

mais différemment

 

astucieux 

McSweeney’s Miranda July Ira Glass David Byrne

fait semblant d’être bête

mais ne se permet pas de l’être 

par crainte d’être vraiment pris 

quelle horreur

pour bête





















le hipster 

s’approprie des éléments de bête 

casquette de baseball pilosités faciales diverses tatouages 

mais comme gestes de mode

et refuse de théoriser sa bêtise 

et tombe donc en plein dans 

bête bête


bête intelligent 

refuse d’appartenir à un camp ou à l’autre

 

bête intelligent

par exemple

incorpore des éléments de ce qui est 

camp 

mais refuse 

de l’être assez pour l’être

 

bête contre intelligent 

n’est pas 

une nouvelle version de hip contre square

 

bête 

est à la fois hip et square


bête intelligent

a ses théoriciens 

de Certeau Goffman Debord 


ceux qui analysent 

les mystères du banal et le caractère exceptionnel 

du quotidien


à partir 

de maintenant 

sauf mention contraire 

lorsque 

je vais parler de bête

je vais signifier bête intelligent