mardi, novembre 21, 2023





I. S.  

que vous a apporté l’écriture de Drame que vous qualifiez dans Vision à New York d’ exercices spirituels  soit cette pleine immersion du sujet dans le langage et même du sujet surgissant du langage 


cette dissolution du sujet correspond-elle à la période des avant-gardes et du groupe Tel Quel que vous avez ensuite quitté désireux de vous affirmer en tant qu’autorité propre avec un moi davantage consolidé dans les romans qui suivent 

?



Ph. S.  


forcément cela correspond à une période de ma vie 

j’ai écrit Drame en 1963-1964 donc j’avais 27-28 ans 

c’est un livre auquel je tiens beaucoup 

parce que je crois que c’est là où 

je commence vraiment à dire les choses 

le Parc c’est encore un peu une aquarelle 

or là phénoménologiquement j’en suis assez content

c’est-à-dire que je m’intéresse aux choses mêmes 

et je l’ai écrit en même temps que 

j’ai écrit mon premier texte sur Dante 

il y a déjà la pensée indienne certainement 

il y a l’Inde il doit y avoir la Chine… 

et l’exergue d’Empédocle si je me souviens bien   

le sang qui baigne le cœur est pensée 

les exergues sont très importants. 

je n’ai pas mis l’auteur exprès 

pour montrer qu’il n’y a aucun nom que c’est déjà un acte 

d’appropriation pour montrer que tout cela marche ensemble 

sans que cela ait besoin même d’être classé 

c’est la définition de ce que l’on pouvait faire 

dans Paradis en mélangeant aussi les noms mais sans majuscules 

c’est-à-dire que tout cela c’est un même tissu 

tout ce qui a été écrit tout ce qui a été pensé tout ce qui a pu se dire 

c’est un unique tissu 

tout est déjà écrit ou à réécrire sans arrêt

c’est pour montrer que la vie 

ce qu’on appelle la vie en fait c’est cela 

rien d’autre 

cela aussi encore est très à contre-courant 

parce que ce n’est pas la story 

le film la bande dessinée le roman… 

donc c’est une expérience très radicale 

avec vraiment une structure la scène du jeu etc.


extrait de 

Philippe Sollers et le dépassement du roman  

entretien avec 

Irène Salas paru dans la revue L’Infini numéro 83 

Gallimard,

été 2003















Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire