dimanche, janvier 15, 2023


Chants cartographiques des grues des dunes


en terre mexicaine

elles ont redéployé les cartes

écrites pour elles dans le 2è monde

sous lumière bleue parlées en voix bleues

les grues apprirent 























les chants 

qui guident dans les mondes à venir


chants nommés 

cartes en leur gorge spiralée

dans le monde bleu ont dansé avec Vent

qui chérissait ces êtres à plumes

lors il moula et façonna leurs corps

leur enseigna 

à chevaucher son souffle

quand conflits divisaient le monde bleu

les grues 

rassemblaient leurs chants leurs cartes

et s’échappaient vers les étoiles

atteignant le Monde Scintillant

une grand-mère sème 

un pollen pour leur retour annuel


dans le mois 

des Petits de l’Aigle elles trouvent leur voie

vers 

un cours d’eau qui s’enrubanne

par les champs de maïs et les peupliers noirs

au long des autoroutes et des câbles électriques


voici 

qu’elles me rappellent maintenant

au pays de la rivière à coquilles de lune

ainsi je poursuis leurs traces jusqu’aux flots

suis debout dans le vent froid

les admirant avec

humilité

car elles voyagent pour moi aussi




Dééł Biyiin


Nakai bikéyadi

kéyah be’elyaaígíí ‘ąą’anáádayiilaa

Ni’Hodootł’izhdi ba’alyaa

Dootłizh bee ndeezdiín dóó bizhí dootłizh

Dééł Biyiin yída holą́ą́’dóó kéyah be’elyaaígíí dayiizhi’

Ni’Hodootł’izhdi Déél Niyol yił daa’oolzhiizh

Niyol Déél bil nizhóní

Áko Niyol Dééł bits‘iis nizhónígo yá ‘ayiilaa

Náhodiina’go Ni’Hodootł’izhdi ałhinaadiijéé’

Déél dabiyiin dóó dabi kéyah be’elyaaígíí ndeidiinil

sǫ́ jígo adaazt’a’

Ni’ Hodisǫ́sgó

Amásání léi’tahdidíín nayiinííł

‘Atsá Biyáázh bich’į́’ anáánaalzhiizhgo

Déél tooh nlínígo ‘anáá’iisdee’’

Dá’ák’eh dóó t’iis biládi

Atį́į́n dóó béésh na‘azt’í biládi

K’ad dashijoozhí

Moonshell tooh nlínídidéé’

Áko Deeł bikéé’yishaał tohgi

Niyol k’az bii’sézį́

‘Ílį́k’ehgo

Díí shaa’alyaa

Biniinaa ‘akǫ́ sézį́


Laura Tohe (née en 1952) est une écrivaine et universitaire amérindienne. Sa langue maternelle navajo, avec ses complexes modes de verbes et classes de mots, ses longs vocables agglutinants et légers coups de glotte marqués d’apostrophes, est parlée dans le sud-ouest des USA par 167.000 personnes et enseignée dans certaines écoles. Ce poème, très musical en navajo, est typographié centré pour évoquer la fluidité de l’eau ou du vol. Il décrit (et accomplit) comment des chants et mythes (réactualisés en poème) peuvent participer d’une préservation culturelle pour une ethnie au langage rare et précieux. Et peut-être aussi d’essayer de nous dire quelque chose sur le respect de la biodiversité avec la perspective « guérisseuse » des Navajos.
















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