lundi, août 15, 2022


note rapide


une bonne part des ennuis 

de la vieillesse vient des autres

jeunes ou vieux 

ils vous retirent

par prudence ou par indulgence ou par mépris

les outils de la vie

les armes

les fonctions


il ne faut pas guetter

il faut attendre


 


si 

l’existence des pauvres 

qui seront toujours nombreux

même si le nombre des riches et demi-riches augmente

est fatalement basse

inculte

sans esprit 

alors la beauté de la nature est empoisonnée 

puisqu’elle n’est que pour les favoris de la fortune

et 
ce monde 
est

un lieu sinistre


essayez 

des systèmes sociaux différents

aucun n’y remédiera


 


Henri Thomas

la joie de cette vie




























Denise Levertov

Au lecteur


 




















tandis que tu lis 

un ours blanc 

à loisir

pisse 

en donnant à la neige

une couleur safran 


 


tandis que tu lis 

un grand nombre de dieux

se vautrent dans les lianes 


yeux d’obsidienne

qui observent les générations des feuilles 


 


tandis que tu lis

la mer tourne ses sombres pages


tourne

ses sombres pages

























l'immobilité a permis la création de la terre

le mouvement celle du ciel


poésie

enfermée dans une chambre


grand danger

pas d’issue



















 


là 

une fenêtre ouverte

vite

plonger 


libre elle vole


mais la pluie fine


la pluie fine


la pluie


tombe


tombe...


tombe...


 

K.

poésies sans raison


si

la terre était 

un globe d'air 

nous ne serions jamais apparus

nous serions transparents et inconsistants

comme elle






















Jean-Luc Parant

je ne verrai jamais mes yeux comme 

je vois ceux des autres
































et si dans 

un miroir 

je les regarde 

je ne les verrai jamais bouger 

mais toujours figés comme si 

je regardais les yeux d’

un mort


voilà le motif 

de la plupart de ses livres  pendant 

cinquante ans


impossible de sortir de cette obsession 


certainement pas pour lui car 


quand 

je vois mes yeux dans 

un miroir 

mes yeux sont tout ce que 

je vois du monde 


l’exploration est toujours à recommencer 
pour réconcilier le Sujet 
avec le monde
















Jean-Luc Parant est un artiste, écrivain et poète français dont l’œuvre tout entière témoigne d’une obsession singulière pour les yeux, et d’une expérience incessante de la vue comme processus. 

Il se décrit lui-même dès les années 1970 comme un « fabricant de boules et de textes sur les yeux », son travail artistique et littéraire est une investigation poétique et protéiforme autour des yeux. 

Au-delà de l’organe de la vision et du symbole, les yeux de Jean-Luc Parant s’expriment par les mains, par les mots, par les boules, pour faire surgir de la nuit, inlassablement, l’existence. 

Jean-Luc Parant, né le 10 avril 1944 à Mégrine (protectorat français de Tunisie) et mort le 25 juillet 2022 à Caen