mercredi, mars 09, 2022

David Lespiau

j’
imagine la lecture 
d’

un quotidien 

lire 

un article au hasard des pages piocher 
un titre de chronique
un nom d’auteur
un titre de livre

construire son propre cheminement 
à l’intérieur du journal 

plus la lecture se poursuit
plus les connexions apparaissent
se ramifient

et rien n’empêche 
de reprendre les textes dans l’ordre à 
un moment donné pour être certain 
d’avoir tout lu 

































c’est ainsi que je procède avec des livres composés de sections autonomes je reprends leur succession en dernière lecture si certains textes m’ont déjà accroché 

les index sont des aides 
pour des lectures plus ciblées 
notamment en cherchant ce qui concerne 
un auteur en particulier avec la bibliographie générale comme appui

les notes en fin de volume fixent l’origine des parutions précisent parfois 
un contexte d’écriture 
une citation masquée 
un prolongement éditorial 

l’index des lieux est mon préféré il est ma carte mentale il indique des raccourcis provoque des courts-circuits dans le corpus

il est essentiellement politique 

on peut le lire aussi comme 
une liste de courses  
des noms où 
aller 
voir
travailler 
penser































Kircher maître des cent savoirs

les quelque trente-neuf livres qu'il écrit touchent les mathématiques l'astronomie la musique l'acoustique l’archéologie la chimie l'optique la médecine sans parler des langues orientales de la volcanologie et d'autres sujets  curieux  même si moins scientifiques : la kabbale l’occultisme… 






























ces livres fourmillent d’intuitions et d’hypothèses diverses dont il laisse à ses successeurs la tâche de les confirmer ou infirmer

souvent comparé à Léonard de Vinci ce génie encyclopédique est appelé 

le  maître des cent savoirs 












Mystères et merveilles du centre de la Terre

Au 17e siècle, l’étude et le savoir sont encore trop souvent cloisonnés en champs étroits avec l’alchimie, les tentatives d’explication empirique, les croyances et les mythes religieux qui contrarient la lente progression des connaissances. 

Mais les sciences géologiques, et en particulier la volcanologie, ne sont pas encore nées que déjà les phénomènes terrestres, notamment volcaniques, font l’objet de recherches inspirées.

Le savant allemand Athanasius  Kircher (1602-1680) est un digne représentant de son époque. 

Voyageur et observateur infatigable (témoin de l’éruption de l’Etna et du Vésuve) ayant une bonne plume, il signe en 1665 un gros traité remarqué et illustré sur les sciences souterraines.

Ce traité constitue la plus populaire de ses 39 publications portant sur des centres d’intérêt variés : musique, optique, mathématiques, mécanique, astronomie, linguistique, archéologie, religions, etc.

Ses convictions fortes de jésuite doublées d’un bon sens pratique d’homme de terrain l’amènent à formuler la théorie du « feu central ». 

Dans une composition baroque, la représentation ci-contre est éclairante sur l'idée, qualifiée de « système idéal » qu'on se faisait alors :

de la structure interne de la terre avec le feu central (assimilé au point le plus éloigné du ciel et donc à la prison des pécheurs) de la circulation des eaux souterraines entre les mers et les montagnes par le moyen de canaux sous l’effet de la chaleur (zone intermédiaire dans laquelle logerait le purgatoire) de l’origine des montagnes et des volcans, répartis à la surface de la terre et séparés par des océans 

Des connaissances en sciences minéralogiques sont aussi présentées selon des classements où les caractéristiques physiques, les qualités descriptives et les appellations des variétés minérales sont encore aléatoires. 

Quant à l’origine parfois fabuleuse de la nature des fossiles ou pétrifications (monstres, profils humains etc.), elle n’ébranle pas l’homme de Dieu qu’est Kircher, pétri d’Ancien Testament.


















 










 


dans son monde souterrain publié en 1664 à Amsterdam Athanase Kircher a dessiné une carte de l'Atlantide appelée Atlantis qui occupe une place centrale entre l'Amérique et l'Afrique

en haut à droite il a dessiné un grand voilier qui au-delà de deux autres îles de moindre importance s'éloigne vers l'Amérique

tout reste à imaginer


*



les Atlantes étaient dans le principe des gens vertueux et justes par excellence  le philosophe athénien le démontre en décrivant l'organisation de leurs armées leurs cérémonies religieuses leur manière de rendre la justice. 

mais
tout d'un coup
ils rompirent avec 
leurs traditions anciennes
































celui qui sait 

interroger et répondre

paraît sage


fils des hommes 

excusez les défauts d'autrui


celui qui parle

toujours 

dit bien des mots sans suite






















si

une langue bavarde

n'est pas contenue

elles se nuit à elle-même




celui qui a vaincu

en paroles

le convive berné

semble sage


l'homme bavard ignore

s'il ne parle point à table avec

un ennemi


celui-là seulement

qui a beaucoup voyagé et voyage encore

connaît

les différents caractères des hommes

s'il est doué de sagesse




la terre nous la parcourons


matin

nous lui baisons

le front




















CHANCE

notre chance

c'
est 
d'

obtenir

que la foudre en tombant  devienne

l'incendie de notre plaisir





















Odin le Roc

l'esprit de l'homme ressemble 

à des copeaux secs et à des écorces de bouleaux conservés

il pourrait

avec des jours et des années

atteindre l'essence de l'arbre









































PAROLE

parole suprême

rien à voir avec le langage conventionnel 


elle est

émerveillement indifférencié 

comparable à

un signe de tête intérieur



je absolu

AHAM

le vainqueur de la mort







je secoue 
le labyrinthe pour multiplier 
les gouttes













impassibilité 
clarté
agilité
subtilité


les Atlantes  n'ont besoin de rien

radieux
ils se déplacent 
instantanément avec 
la rapidité de la pensée 
et traversent sans résistance tous 
les obstacles


celui
qui connaît 

le souffle du souffle
la vue de la vue
l'ouïe de l'ouïe

celui là
a pénétré l'absolu

on ne peut 
le voir que par la pensée


*



j'ai croisé
d'abord sans les voir
les images 
envahissantes et fugitives
autour desquelles
je tourne
aujourd'hui































JOUR

je suis 
le tout
le tout est sorti de moi et 
le tout est parvenu à moi

fendez 
du bois
je suis là

soulevez 
une pierre

vous 
me trouverez


il n'y a pas d'autre là que ce là
ainsi parle
le vivant lui-même
fils du vivant




































comme l'océan où affluent les eaux
tout en se remplissant 
garde
un équilibre immuable
de même celui en qui affluent tous les désirs
peut conserver le repos



le mortel qui ne cherche sa joie qu'en l'âme
et qui
en l'âme et en l'âme seule
se rassasie pleinement
celui-là
n'a rien à accomplir 


comme 
un grand vent
toujours en mouvement
s'insinue partout
ainsi toutes les créatures
sont en moi


























lorsque tu feras voile pour Ithaque

souhaite que la route soit longue

pleine d'aventures 

pleine d'expériences


les Lestrygons et les Cyclopes

le furieux Poséidon

ne les crains pas

tu ne trouveras pas 

de choses pareilles sur ta route


























c’est bien un accent unique auquel s’élèvent auquel reviennent malgré eux ces grands chanteurs que sont les musiciens originaux et qui est une preuve de l’existence irréductiblement individuelle de l’âme

et de même que certains êtres sont les derniers témoins d’une forme de vie que la nature a abandonnée je me demandais si la musique n’était pas l’exemple unique de ce qu’aurait pu être  s’il n’y avait pas eu l’invention du langage la formation des mots l’analyse des idées la communication des âmes

elle est comme une possibilité qui n’a pas eu de suites 

l’humanité s’est engagée en d’autres voies

celle du langage parlé et écrit

mais ce retour à l’inanalysé était si enivrant qu’au sortir de ce paradis le contact des êtres plus ou moins intelligents me semblait d’une insignifiance extraordinaire


*
















le texte 
se déploie comme 

une cantate 


où 

les blocs de voix 

percutantes

s’
enlèvent au-dessus 
d’

un passage à vide 

pulsion continue